Tu ne sais pas trop ce que tu fais ici et surtout, tu n’aimes pas trop le billard alors pourquoi tu as accepté de venir à cette soirée de rencontre organisée par un bar de Sanbu ? Ah oui, bien sûr, à cause de tes amis qui t’y ont obligé. Ils sont venus chez toi après 20h, ce jour-là pour te kidnapper à cette soirée. Tu étais tranquille chez toi en train de jouer du piano dans le but de composer une bande son pour une future série, que l’on t’a demandé. Tu as dû laisser place à ton cher sweat à capuche, tes lunettes et ton jogging pour troquer un costume bleu nuit avec chemise blanche et tes lentilles. Te voilà transformé à ton plus grand regret mais ce sont tes meilleurs amis alors tu te dis qu’au moins, au lieu de rencontrer des gens et parler avec eux, tu passeras la soirée avec tes amis. Enfin, ça c’était ton plan bien entendu.

Vous vous rendez ensuite jusqu’au bar de Sanbu qui organise cette soirée. Le seul bar de tout Sanda qui a une grande salle, qui a un billard et qui organise ponctuellement des soirées de rencontre. Bougonnant, tu suis tes amis d’un pied trainant, les mains dans les poches de ton pantalon, une cigarette au bec. Tu sais très bien que ça va être un horrible désastre car tu es trop timide avec les femmes et que tu bégaies tout le temps quand il te faut parler avec elles. Quand vous arrivez avec tes amis, ce n’est pas encore la grande heure de pointe, heureusement pour toi. Il y a quelques demoiselles et quelques hommes. La stratégie ? Boire un coup en mangeant des tapas et jouer au billard en montrant ses compétences pour faire monter la curiosité chez les demoiselles. Boire un coup et manger, ça, ça te va bien oui. La suite ? Pas trop non. Tu trouves une table pendant que tes amis vont commander à boire et à manger. Comme ils te connaissent bien, ils savent ce que tu vas prendre. Une bière pour commencer. Tu t’installes à cette table, les regards de certaines demoiselles se posent déjà sur toi, te mettant mal à l’aise tout de suite.

Oui tu attires l’œil dans ce costume et tu le sais. Pourtant, tu n’as jamais voulu être sous les feux des projecteurs et tu n’as plus l’intention d’aimer tant la dernière relation t’a fait du mal. C’est aussi sans doute depuis ce moment que tu te mets à bégayer dès que tu croises une jeune femme. Alors, tu es là dans ton costume, des demoiselles te reluquant encore et encore alors que tu te sens de plus en plus mal à l’aise et que tu aimerais juste t’enfouir dans un trou de souris. Heureusement, tes potes reviennent et s’installent, éclipsant ainsi les regards de ces jeunes femmes.

« Allez mec, détends-toi ! On est certain que ça va te faire du bien, il faut que tu fasses de nouvelles rencontres ! »

« Hé… Je n’ai jamais demandé à venir ici hein. J’étais très bien chez moi. »

« Rabat-joie ! Trinquons à notre soirée et aux nanas que l’on va draguer ce soir ! »

Bande de crétins tu es en train de te dire alors que vous trinquez une fois vos boissons arrivées. Les tapas ne tardent pas et tu pioches dedans comme si tu n’avais rien mangé de la journée. Ah rectification, tu étais trop concentré dans ton travail que tu as oublié de manger alors tu dévores en te contentant de boire et sans t’en rendre compte, les heures passent et tu enchaines les verres. Alors que la fête bat son plein, tu vois des couples d’un soir en train de se former et toi, tu restes seul dans ton coin, montrant ton visage le plus terrifiant que tu peux faire pour éviter que des femmes ne viennent t’embêter. Pourtant, tu te sens obligé d’intervenir quand tu entends des bruits de bagarre non loin de là. Au niveau du billard plus exactement. Titubant un peu à cause de l’alcool, tu t’avances vers tes amis et d’autres gars dont un roux qui semblent être en colère. Tu sens la tension palpable entre les deux camps.

« S’passe quoi ? V’pouvez pas jouer en silence bordel ? Vous me gavez avec votre billard là. »

Comme si tu étais habité, tu prends une des boules de billard et tu vises l’un des types qui en voulait à tes amis. Et là… Tu te dis que tu n’aurais vraiment pas dû venir.

Tiens, il manquait plus que ça tu te dis. Le gars aux cheveux rouges rattrape la boule noire de billard que tu venais de lancer et en plus de cela, il voulait que tu le défies au billard. Tu n’as jamais aimé ce jeu, de ce fait tu n’es pas bon du tout et tu regardes un de tes amis avec un air blasé. Et en plus, celui qui perd doit payer sa tournée. Tu soupires de nouveau en regardant qui est vraiment dans tes amis et tu finis par choisir Hako. Pour l’avoir déjà vu jouer, tu sais qu’il s’en sort plutôt bien. Tu n’as pas spécialement envie de perdre et devoir payer ta tournée alors tu mises tout sur ton ami. Nul doute que le camp en face risque de faire pareil et la jouer stratégie. Mais dans ce monde, il faut savoir être impitoyable quand l’occasion s’en présente.

« Vas-y… Je compte sur toi Hako… J’sais pas du tout jouer à ce jeu… »

Il te fait un sourire avant de venir ébouriffer tes cheveux comme il a l’habitude de le faire et comme toujours, tu grognes un peu car tu n’aimes pas ça. Tu aurais limite préféré que ça se termine à la bagarre plutôt qu’au billard mais en même temps, ravi de voir que tu ne vas pas finir avec des cocards et du sang sur les mains ce soir. T’avais juste envie de boire et manger avec tes amis, c’est tout. Le roux et son ami prirent leurs cannes sous tes yeux pour ensuite aller se placer à une table vide pendant que toi et ton ami, penauds, vous attrapez chacun une canne noire avant d’aller vous positionner à la table de billard où se trouve déjà les deux hommes que vous allez affronter. Tu n’as jamais compris pourquoi les gens aimaient ce jeu, surtout que tu ne comprends pas vraiment les règles.

« Vous avez des règles de jeu ? Ou c’est juste faut rentrer les boules rayées ou colorées avant les autres ? »

C’est la seule que tu connais au billard mais tu te doutes bien qu’il y a d’autres règles. Ce serait trop facile sinon. Et puis à quoi bon qu’il y ait de vrais tournois si c’était aussi simple que cela. Tu attends la réponse des joueurs d’en face pendant que ton coéquipier remet les boules de billard correctement, utilisant le triangle pour qu’elles soient bien positionnées. Tu fais confiance à ton ami de toute manière et peu importe si tu ne comprends pas les règles, du moment que tu fais ce qu’il te demande. Tout devrait aller sur des roulettes n’est-ce pas. Et comme tu es fair-play et que tu n’en as rien à faire, tu regardes le rouquin.

« Vous pouvez commencer. »

Tu regardas l’homme aux cheveux de feu et secoua légèrement la tête quand il te demanda si tu ne connaissais pas du tout le jeu. Toi, tu préfères le jogging ou alors le piano. Voilà ce que c’est ton hobby : le piano, pas un vulgaire jeu où l’on doit rentrer des boules de différentes couleurs puis la noire dans les paniers pour gagner le jeu. Une fois les règles correctement expliquées, tu regardes l’adversaire jouer et ainsi tu comprends bien vite que vous avez les rayées. Tu hoches la tête, c’est à ton ami de jouer en premier et forcément, il ne peut s’empêcher de sourire de façon narquoise à l’homme avant de commencer à jouer et grâce à la blanche qui heurta de côté une des rayées, il put en mettre une seconde dans le panier. Puis ce fut à ton tour. Tu regardas la boule blanche que tu devais tirer sur les autres puis tu viens te placer de sorte à pouvoir tirer du mieux possible sur l’une des rayées qui trainait.

Mais manque de pot, tu ratas ton tir et tu fronças légèrement les sourcils quand tu vis l’homme mettre de la poudre bleue sur sa canne pour la luire et éviter les coups foireux lors des prochains coups. Hako t’expliqua à quoi ça servait, de ce fait, tu fis pareil. Les coups s’enchainaient mais Hako, tout comme toi, avaient du mal à mettre vos boules dans les paniers tandis que l’adversaire avançait bien dans la partie et il ne leur en restait plus beaucoup. Tu n’avais pas spécialement envie de payer ta tournée mais il semblait être indéniable que ton ami et toi, vous alliez perdre.

« Nan c’est bon. Je n’aime pas ce jeu donc peu importe que je perde. »

Tu as juste envie de te barrer de là et de rentrer chez toi en fait. Hako finit par rentrer les autres boules pour toi mais c’est trop tard, vous avez perdu alors tu soupires intérieurement car tu vas devoir payer ta tournée à cet homme et ses amis. Tes autres amis qui ont regardé la partie viennent t’ébouriffer les cheveux à leur tour, comme pour te réconforter. Encore une fois, tu fais une mine bougonnant mais à la fois, tu sais qu’ils ne veulent que ton bien et que malgré tout, tu n’aimes pas perdre. Juste, tu n’as pas envie d’exploser de colère pour pas grand-chose alors tu préfères couler et tu te diriges vers le bar pour commander une autre bière. Tu sais très bien que ce n’est pas très bon pour toi, vu déjà ton taux d’alcool mais au pire, tu prendras un taxi pour rentrer si vraiment tu n’y arrives pas. Tu te tournes vers l’homme aux cheveux rouges.

« C’est quoi l’plaisir dans ce jeu ? Nan parce que c’est pourri et hyper chiant je trouve. J’vois absolument pas le plaisir de tirer dans des boules de couleur pour gagner la partie. »

Tu hausses légèrement le ton en récupérant ta bière et après la première longue gorgée, tu vas te mettre dans un coin, t’asseyant dans un fauteuil bien cozy où tu risques certainement de finir ta soirée. Tes amis font une grimace en se disant que ça y est le Eiji il est en pétard. La musique est trop forte pour toi et tu finis par te lever non sans mal pour sortir devant le bar avec ta bière, profitant en même temps de mettre une cigarette dans ta bouche. Tu aimes le son, au vu de ton métier mais quand tu es ivre, tu ne supportes pas la musique forte. Ça te donne rapidement la migraine.

Quand tu l’entends crier tourner générale à toute la populace présente dans le bar, ton sang ne fait qu’un tour et tu le regardes mauvais avant de répliquer d’une voix pas forcément très sympathique.

« Hé ducon ! J’ai pas dis que je payais une tournée pour tout le monde ! Seulement pour tes potes et toi. »

Ça y est, il t’a vraiment mis en pétard, tu maugrées en sortant quelques billets, et tu te carapates vite fait bien fait dehors avec ta bière pour aller te fumer cette cancéreuse. Nan mais c’est sérieux, c’est quoi son problème ? Il a cru que tu étais riche à gogo pour te permettre de payer une tournée à tout le monde ? Ho certes, il est vrai que tu gagnes plutôt bien ta vie mais il n’empêche que tu n’as pas envie de payer à boire à tous les gens qui sont ici. Ceux que tu ne connais pas pour la plupart. Et en plus, il a pris le cocktail le plus cher de la carte ! Il ne t’en faut pas plus pour vouloir lui foutre un pain dans la tronche. Sans rancune ? Tu le regardes de façon hautaine avec tes yeux de vipère qui n’ont qu’une envie : le mordre. Ton poing finit par s’abattre sur sa joue gauche, un peu par automatisme.

« Qui es-tu pour oser me juger sur ce que je peux aimer et ne pas aimer ? Au lieu de passer 2 heures à jouer et attendre qu’une putain de boule noire à la noix soit enfin tirée, parce que personne n'est capable de la mettre en deux coups à l'opposé, et annonce la fin du jeu, je préfère mais largement assister à une pièce de théâtre ou bosser ! »

Tu finis par finir et ta bière et ta cigarette avant d’en reprendre une. Faudrait peut-être se limiter un peu hein sur la consommation, ce n’est pas bon pour la santé. Tu le sais mais quand tu es en proie à un fort stress ou une forte colère, tu ne peux t’empêcher d’allumer cigarette sur cigarette jusqu’à ce que tu sois complètement calmé. Et cet homme aux cheveux rouges a l’air plutôt avoir envie de te taquiner et de te faire sortir de tes gonds plus qu’autre chose. Tu allumes ta deuxième cigarette quand il te demande si tu es nouveau par ici, car il ne t’a jamais vu. Que tu lui racontes d’où tu sors ? Tu ne sors de nulle part, tu habites juste à quelques rues de là, c’est tout. Tu pousses un long soupir, tirant une latte sur ta cigarette avant de le regarder à nouveau, un peu moins sur les nerfs cette fois-ci. Le coup de poing t’a semble-t-il permis de te calmer un petit peu.

« Je ne suis pas nouveau non, je ne fréquente juste pas les bars en soirée. J’habite dans le quartier. Toi, je suppose que tu es l’un de ces fichus délinquants qui polluent Sanda et qui rêvent de révolution en s’en prenant aux Yakuzas de Kobe, ou en tuant des civils, juste parce qu’ils sont passés au mauvais moment, au mauvais endroit hein ?! »

Tu sais que ça pourrait mettre de l’huile sur le feu de parler de ça mais ton état de sobriété ne te permet pas de rester lucide dans tes propos. Comme si d’un seul coup, sous l’effet de l’alcool, tu étais investi d’une sorte de mission : faire cracher les gens. Mener ta propre révolution contre les délinquants de Sanda qui nuisent à la réputation de la ville et qui fait qu’on se sent en danger permanent. Sans le vouloir, tu lui dévoiles aussi un événement qui s’est passé dans ta propre vie. Indirectement mais cela n’enlève rien au fait que tu as vécu un traumatisme ce jour-là en passant au mauvais moment, au mauvais endroit. Ton regard est rempli à la fois de haine et d’une immense tristesse quand tu l’accuses.