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Mercredi 3 novembre 2020
Quel monde de merde !
Ca doit faire la trente six millième fois que je me le dis depuis le début de cette p*tain de journée.
Entre ma nuit de m*rde avec des cauchemars à tout va, ma claustrophobie qui m’a fait paniquer dans la salle de bain alors que je voulais juste prendre une douche (je ne sais pas comment j’ai fait pour m’en sortir, soit dit en passant…) et mes pertes de mémoire, j’ai de quoi devenir fou ! Non mais sérieux ! Je suis passé de ma salle de bain à dehors en un instant ! Sans raison !
L’heure ? Presque dix heures ?! Mais qu’est-ce que j’ai foutu ?! Il y a pas moins de deux ou trois heures qui sont passées ! Encore… P*tain !!! C’est encore arrivé ! Et au pire moment en plus ! Je n’ai plus que quelques minutes pour aller à l’hôpital. Pas de fric pour un potentiel taxi. Pas de téléphone pour prévenir d’un éventuel retard puisque je ne peux pas vraiment me payer le luxe de débourser deux cent balles dans cette m*rde de technologie. Résultat : je dois courir. Alors je cours.
Je ne l'ai pas vérifié avant, mais il faut croire que je me suis bien habillé. Je veux dire… j’ai un jean qui frotte pendant ma course, j’ai un haut... Et, tout aussi important, j’ai une paire de basket à mes pieds. Franchement, ça ne devrait pas, mais je respire mieux depuis que je sais ça. Un regard rapide sur mon reflet dans une vitrine.
…
… …
Mais qu’est-ce que je fous moi ?! C’est quoi ces fringues ?!
Non mais du rose ! Je porte une [noms d'oiseaux censurés] de veste rose !! Et je ne parle même pas de la tenue en général ! J’ai l’impression d’être un clown !
Résumons ! J’ai un jean. Un jean troué sur toute la longueur, sur le devant. Les baskets… ça peut aller je crois. Je n’ai non pas un haut, mais trois ! Un tee-shirt rayé noir et blanc sous un second plus blanc qu’autre chose avec quelques ornements que j’ai peur de détailler, le tout surmonter de la fameuse veste rose… et chaude avec ça. Et avec des fermetures éclair inutiles sur les manches. Tout pour plaire ! Le jean passe encore à côté de… cette chose ! Sans parler de la casquette.
Je vous le dis. Un clown !
Pas le temps de m’arrêter pour me déshabiller ! Je dois me dépêcher ! Je sais où je suis, ça aide. Un peu. Surtout que je ne suis pas si loin que ça.
J’arrive pile poile quand on m’appelle. L’heure ? Quelques minutes de retard je crois. Mais le psy’ n’en a rien à f*utre donc ça ne doit pas être grave. Un haussement d’épaules et on va dans son bureau.
…
Non mais c’était quoi cette sal*perie de séance ?!!
Du grand n’importe quoi ! C’est moi qui vous le dit !! Mais même si j’ai cette impression, j’ai vraiment l’impression d’en ressortir plus perdant qu’autre chose. Ça m'énerve !!!
Mon pas est lourd dans le couloir. Ça résonne. Je vois des gens tourner le regard pour me regarder passer. Ils veulent ma photo ?! Si seulement c’était une de ces personnes que j’ai l’habitude de voir… Mais je ne dois pas être dans le bon service. Dommage.
Je suis où ? Pas de panneau. Oh et puis zut ! Je m’en fiche ! C’est pas comme si j’étais perdu de toute façon.
Par contre, il manquait plus que l’abruti de service qui ne regarde pas où il va pour me rentrer dedans ! M*rde !! Je commençais seulement à me calmer un peu ! Fait chier !!!
- T’peux pas r’garder où t’vas fumier ?!!
Je n’ai pas envie de faire un effort. J’ai trop donné pour la journée. Même rentrer chez moi me gave ! Alors chercher une once d’empathie pour être poli envers un connard qui n’est pas capable de faire attention à ce qui l’entoure, même pas en rêve !
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From misunderstanding to fight
De nouvelles habitudes qu’il a fallu prendre… Des bilans toutes les semaines pendant le premier mois qu’on vous dit ; j’ai déjà dû perdre au moins 5 litres de sang dans cette affaire. Puis ensuite, pendant deux mois, des bilans toutes les deux semaines pour être sûr que tout va bien au niveau de votre greffe du foie. J’arrive au dernier bilan du troisième mois, celui qui va être déterminant pour la suite puisque non seulement, je vais avoir le droit à une prise de sang, voire d’un scanner comme les dernières fois, mais j’ai également le rendez-vous de suivi avec le chirurgien et l’hépatologue. Si tout va bien comme il y a deux semaines en arrière, mes rendez-vous seront enfin espacés ! Et la chose la plus importante, rééquilibrer mon traitement immunosuppresseur. Sauf que j’ai toujours peur qu’avec ce saleté de traitement, le gêne de Huttington s’active et que donc la maladie commence… Bon, ça ne fait que trois mois et j’ai déjà choppé un rhume il y a deux semaines. Merci la réactivité du truc… En même temps, je savais bien quand le médecin m’a expliqué que je serais plus sujet à chopper des trucs parce que bah prendre un traitement immunosuppresseur, ça sert à dézinguer un peu le système immunitaire pour que la greffe prenne bien. Et en plus de ça, ils se sont aperçus que je n’étais pas à jour niveau vaccins, alors j’ai dû me farcir tous les vaccins qu’il y avait à faire avant que l’on n’entame le traitement.
Mon séjour à l’hôpital parce que j’étais entrain de crever, n’aura pas été de tout repos. Cela ne fait que trois semaines en réalité que je suis rentré à la maison. Ils ont voulu me garder plus longtemps car au début, je faisais un rejet de greffe. Mais depuis que je prends ce traitement, ça commence à aller mieux. Fin, je crie pas victoire parce que bah on ne sait jamais. Bref, il s’est avéré que c’est dans l’hôpital de Sanda que je me suis fait opérer, donc j’ai tous mes rendez-vous là-bas. D’un pas presque blasé, je me rends jusqu’au service où j’ai rendez-vous, l’air un peu pâle. Le médecin m’accueille, me demandant comment je vais. Je me sens barbouillé et un peu stressé, comment il veut que je me sente ?! Bref, on part pour faire le bilan sanguin et ça dure encore longtemps ; je suis sûr ils m’ont encore pompé plein de litre de sang ! Je vais me vider de mon sang avant même d’avoir vu la fin d’année passer !
Après le bilan sanguin, l’attente, je retourne dans le bureau de l’hépatologue avec le chirurgien qui est là, qui profite de regarder si ma cicatrice est jolie et me remets un pansement. Les points de suture ont commencé à partir d’eux-mêmes mais il y en a encore quelques uns. Dû à cette petite opération que j’ai dû avoir pendant mon séjour puisque au début le greffon ne voulait pas prendre. En même temps, je me tape le foie d’un mec que j’ai buté, ça se comprend qu’une partie de lui ne veuille pas être dans ce corps ! Et en plus de ça, ça fait depuis quelques jours que je me tape des insomnies et autant dire que ce n’est pas forcément très bon pour la guérison.
Dehors à déambuler dans les couloirs bien plus tard, j’ai l’air plus que livide. Le bilan n’est pas mauvais en soit, le greffon prend bien mais du coup on change d’immunosuppresseur car ça me flingue plus que ce que ça ne devrait à l’heure actuelle. Et avec ça, j’ai une légère anémie qu’il faut surveiller quand même. La fatigue en plus de ça, non vraiment journée un peu pourrie. Et c’est quand je me fais insulter, que je finis par comprendre que je suis rentré dans quelqu’un, et que je me « réveille ».
« Heeeeein ?! T’avais qu’à regarder où tu mettais les pieds petit con. »
C’est de sa faute à lui aussi je ferais dire ! Il avait qu’à regarder lui aussi où il allait au lieu de m’insulter directement. D’ailleurs, je suis tellement pas d’humeur que sans une once d’hésitation, bien que je ne sois pas dans ma meilleure forme, je finis par le chopper au niveau du col. Je le toise de ma hauteur, fronçant les sourcils en mode intimiste avant de le relâcher et le pousser. Il est très mince, nul doute qu’avec la force que j’ai mis, il va tomber. Et sans une once d’empathie, je finis par le contourner pour me diriger doucement vers la sortie.
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Mercredi 3 novembre 2020
Pfff !
On ne peut même plus marcher tranquillement dans un hôpital maintenant ! Il y a de quoi se frapper la tête contre un mur !
Pourquoi pas, tiens ? Peut-être que ça me calmerait un coup puisque la marche semble assez limitée. Ouais… C’est le cas de le dire ! Si rien que buter contre un imbécile suffit à m’énerver plus que je l’étais déjà, c’est que ce n’est clairement pas efficace en vrai.
Les psy’ ne donnent que des conseils à la con !!
Non mais je rêve ou je me fais insulter ?!!
De quel droit ?!!
Et contrairement à lui, je regardais où j’allais ! Pourquoi ne le ferais-je pas ?! Je ne suis pas comme tous ces enfoirés qui se croient seuls au monde alors qu’il y a des malades autour d’eux qui sont plus faibles que nous !!
Je ne suis pas comme lui !!
- Facile d’rejeter la faute sur d’autres, hein ?
J’ai envie de le frapper. Une bonne grosse torgnole dans le pif. Ça ne lui ferait pas de mal, tient !
Une envie qui est encore plus forte quand il me prend par le col.
Il croit me faire peur ? Sérieux ?! Il croit me faire peur ??!
Même une petite vieille aurait les cou*lles de lui dire ses quatres vérités ! Moi, je préfère le regarder droit dans les yeux pour lui montrer que je n’ai pas peur de lui. Jamais de la vie ! D’ailleurs, il n’y a qu’un homme qui me fait vraiment peur. Et ce ne sera jamais cette sal*pe !
Il me lâche. Lassé ?
Pfff !! Quelle tapette !
Par contre il a de la force le bougre… En tout cas, il me prend par surprise pour me pousser.
Je marmonne dans ma barbe :
- Merde !
Ça ne m’arrange pas de me montrer aussi faible face à lui !
Qu’à cela ne tienne, je n’ai qu’à renverser la tendance ! Puis comme il me tourne le dos, c’est une aubaine !
Je me lève en me tournant dans sa direction.
Je souris : je dois ressembler à un coureur dans les startings blocks. Bref ! Concentration… Le bon moment est… maintenant !
Je m’élance pour l’attraper pas la taille. Profiter de l’effet de surprise. Je me contorsionne pour tenter un croche-pieds dans l’espoir de le faire tomber au sol. Ce n’est que justice !
Faites que ça fonctionne. J’ai envie de le tabasser alors qu’il est au sol ! Je veux qu’il redescende sur terre ! Je veux qu’il en prenne pour son grade ! Je veux toucher son égo !
Ouais, je veux me défouler surtout !
J’en ai assez de devoir me retenir ou de me contenter de murs inutiles
Je veux frapper un être humain, encore plus s’il m’a cassé les cou*lles ! Surtout ceux qui ne me respectent pas !
Un des trucs que j’ai appris avec l’homme qui a été comme un père pour moi, c’est que j’ai le droit au respect, à l’amour et la sécurité. C’est mort pour les deux derniers. Alors je veux le premier ! C’est normal ! Il n’y a aucune raison pour qu’on me le refuse !
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Comment ça facile de rejeter la faute sur les autres ? Pffeuh, je ne suis vraiment pas d’humeur aujourd’hui et le bilan dressé par le médecin n’étant pas totalement réjouissant, ça me donne encore moins envie de faire des efforts pour être un tant soi peu gentil. Je sais bien que tous les gens qui viennent ici sont malades, y’en a qui sont encore plus malades que moi, et certainement lui. Mais de quel droit ose-t-il me chauffer de la sorte et m’emmerder ? J’ai envie de le frapper maintenant. J’ai espéré inutilement que la chute le fasse se calmer, dommage…
Je fais à peine quelques pas que je sens quelque chose ou du moins quelqu’un m’attraper par la taille, effet surprise garanti j’en perds l’équilibre car il a su bien placer son pied ensuite pour me faire tomber. Je ne suis pas vraiment pas dans mon assiette pour ne pas avoir su esquiver ça et éviter de voir le sol se dérober sous mes pieds. Je finis par atterrir un peu lourdement sur le sol, dans un magnifique élancer. Digne d’une danseuse d’opéra mais la grâce en moins… Je m’étale comme un con, une main contre mon ventre pour éviter tout choc même si j’ai encore un pansement à cet endroit là, et l’autre main pour me rattraper un peu.
« Et merde ! »
Ah ça y est, là le gamin m’a complètement énervé. Et je ne peux même pas me relever car il est sur moi ! Je retire ce que j’ai dit, cette brindille pèse son poids quand même.
« Ecoute, j’suis tellement pas d’humeur que je vais te laisser les deux premiers coups, après je réplique, ça te va ? Pas comme si je pouvais crever à tout instant, de toute manière… »
Quel tremolo à deux balles pour essayer de l’attendrir, bien que mon ton soit complètement désintéressé sur la fin. Menaçant presque au début puis désintéressé. Et non, bien heureusement, enfin normalement, je ne devrais pas mourir dans les deux prochaines minutes. A part si ce sale gamin frappe là où il ne faut pas et je ne donne pas chère de ma peau. J’ai déjà dû passer par deux opérations pour que ce greffon prenne enfin ; ce n’est pas pour que je me fasse tuer une troisième fois !
Je le choppe pour pouvoir me retourner et le faire se décaler en même temps, afin d’être sur le dos car c’est quand même un peu plus agréable que d’avoir la main broyée. Je le défie du regard et ainsi il peut voir mon joli visage qui n’inspire pas confiance et qui est surtout empli de colère. Et là… En le regardant, une expression non pas douloureuse mais… Fin en gros, je viens de m’apercevoir qu’il a une tenue des plus ridicules et j’ai tellement envie de rire, de me moquer mais je tente tant bien que mal de rester dans le rôle du méchant. Sauf que la commissure au coin de mes lèvres trahit énormément le fou rire qui est sur le point d’arriver.
Bon bah désolé hein mais je ne peux m’empêcher ; je ne peux pas garder ce fou rire qui est entrain de me prendre aux tripes. Je n’aime pas me moquer du style des autres mais là franchement… On dirait un gros clown avec sa tenue de toutes les couleurs qui n’ont rien à voir ensemble en plus de ça.
« Ho gars t’as trouvé tes affaires dans une poubelle ou quoi ? fufufufu… Si t’as pas d’argent pour t’en acheter, il y a sûrement des associations qui donnent gratuitement aux plus précaires hein ! Fiiiiiiouuuuuu »
C’est sorti tout seul et vu comment il avait énervé, au point de se jeter sur moi, je crois que je signe mon arrêt de mort. Un petit pincement au niveau de mon ventre me rappelle bien vite à l’ordre et mon fou rire disparait presque en un clin d’œil. Et oui, je suis comme ça. Je peux passer du fou rire à la haine, à la violence en moins de deux.
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Mercredi 3 novembre 2020
Quand je me suis “réveillé”, je suis assis à califourchon sur le dos d’un mec que je ne connais pas du tout.
…
Il s’est passé quoi, encore ?
Un coup d’oeil autour de moi, je suis à l’hôpital, non ?
Froncement de sourcils.
Si je me rappelle bien…, la dernière fois que je suis sorti, c’était déjà le jour du psy et je n’avais pas trop envie d’y aller donc j’ai pris un chemin un peu différent pour faire un petit détour en y allant.
Un coup d'œil à ce que je porte…
OK ! Impossible que ce soit les autres qui aient choisi ces fringues, donc c’est la deuxième fois que je sors aujourd’hui. Cool ! Ce n’est pas souvent que ça arrive. Autant en profiter un max !
Par contre… je ne sais toujours pas ce que je fous assis sur ce pauvre bougre.
Bon ! Regardons un peu tout ça de plus près…
Le mec est sur le ventre et semble se retenir d’une main. L’autre est… sous son corps. C’est zarb’...
Passons ! Je me pose une question du coup : comment ça se fait que je me retrouve comme ça alors que cet homme est clairement plus costaud que nous ? Bon, sûrement qu’il y a eu bagarre et…
Le mec confirme ma supposition en coupant ma réflexion. Il y a eu bagarre et, là, il est en train d’accepter de se faire frapper gratos avant de rendre les coups. Mmh… Sans moi, mec. C’est pas trop mon truc, moi. Même si je sais que ça ferais plaisir à d’autres, pas à moi. Je passe mon tour. Encore plus s’il est sur le point de crever.
Ah… Je voudrais plus de détails…
Je sens que le zigoto veut bouger.
Je me lève et le laisse se tourner sur le dos en le regardant faire. L’observer pour évaluer la situation. Ce serait bien que j’en sache plus.
Je remarque son regard. Alors, je lui offre mon plus beau sourire et un signe de main en guise de salutation. Moi, c’est la première fois que je le vois et je suis du genre poli. Pas comme certains…
J’ouvre les yeux, alerté par un soudain fou rire.
- Euh…. Mec ? T’es sûr que tu vas bien ?
C’est vraiment un drôle de luron celui-là.
Je le laisse faire. A sa guise, franchement, ça fait du bien de rire. J’ai meme bien envie de rire avec lui. Mon sourire est donc toujours présent.
Il n’en pâtit pas alors qu’il critique les vêtements que j’aime. Bon, clairement, il n’aime pas et il a le droit. Je m’en fiche qu’il pense que je suis un clodo.
Je profite qu’il se calme pour m’accroupir à côté de lui, ma tête dans ma main, coude sur le genoux, et le sourire aux lèvres :
- Ben écoute, libre à toi de pas aimé, hein. Et si ça peut te rassurer, je te taperais pas. Je sais pas ce qu’il s’est passé avant, mais même pour ton avis sur mon style, j’ai pas envie de te frapper.
Je le regarde encore un instant et remarque qu’il se tient son ventre. Une douleur ?
- T’as besoin d’aide pour te lever, mec ? … Ah ! Et avant que tu me sautes à la gorge, je préfère te dire tout de suite que moi j’y suis pour rien dans la bagarre que t’as eu. Je sais même pas ce qu’il s’est passé pour que j’sois sur toi et que tu m’invite à te mettre deux coups, OK ? Alors je peux appeler une infirmière si tu veux, mais moi je te ferais rien. D’acc ?
J’aimerais vraiment qu’il me croit… Ca fait trop longtemps que je n’ai parlé à personne d’autre que des morceaux de papier et mon reflet dans des miroirs brisés de la maison. Je me sens un peu seul. S’il veut bien comprendre que la situation a visiblement changé, peut-être que je vais pouvoir me faire un pote. J’aimerais bien !
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Okay, soit je suis tombé sur un fou, soit je suis tombé sur un fou. Où est passé le sale môme qui me voulait frapper parce qu’il était énervé que je lui rentre dedans ? Pourquoi cette personne est entrain de me saluer poliment, tout en souriant grandement alors que j’ai juste envie de l’étriper ? Il me demande si je vais bien à cause de mon fou rire… Non mais il me fait quoi là ?? Une fois que je suis calmé et du coup que le jeune homme ne soit plus sur moi, j’en profite pour me redresser en m’essayant à même le sol, dans une position presque de tailleur. Et en plus, il ne me traite même pas de tous les noms alors que je viens de me moquer ouvertement de sa tenue… De plus, il ne sait pas ce qu’il s’est passé avant mais il ne compte pas me frapper ?! Je ne comprends absolument plus ce qu’il se passe et il m’énerve en même temps que de me prendre à défaut car je suis complètement décontenancé ! Mais qui est ce gars bordel ? Serait-il atteint d’un trouble de la personnalité ? Ca se pourrait s’il passe d’un mec complètement énervé qui a juste envie de me frapper à… un mec à la personnalité plus douce qui s’en fiche même qu’on se moque de lui. C’est vraiment décontenançant et énervant à la fois.
Et en même temps, il pourrait juste faire semblant de m’attendrir en devenant beaucoup plus doux d’un seul coup mais je ne sais pas pourquoi, je crois moyennement à cette seconde hypothèse. Il semble ensuite avoir remarqué que je m’étais tenu le ventre puisqu’il me demande poliment si j’ai besoin d’aide pour me lever. Et me réitère ses propos, comme quoi il n’est au courant de rien pour cette histoire de bagarre, qu’il ne se souvient même pas de comment il a pu se retrouver sur moi et que je l’invite à lui mettre deux coups. Okay… Décidément, j’ai dû tomber sur un gars complètement taré. M’étonne pas vu que les bureaux des psy sont par ici. Appeler une infirmière ? Hm, non, je pense que ça devrait aller. Est-ce que je devrais vraiment le croire quand il me dit qu’il ne va rien me faire ? Je me méfie tout de même.
« Ca va aller… Je voulais juste éviter en tombant une possible réouverture de ma cicatrice. »
Bien que normalement non puisque la plaie est quasiment complètement guérie mais comme j’ai encore quelques points de suture apparents, on ne sait jamais. Toujours être méfiant et prévoyant même quand il n’y a plus de danger à proprement parlé. Et d’abord, pourquoi est-ce que je suis allé lui dire ça moi ?!
« J’sais même pas pourquoi je t’en parle, tu m’as grave vénère avec l’autre là. T’es une de ses personnalités c’est ça ? »
Il y a que très peu de personnes atteintes du trouble de la personnalité au Japon, à ma connaissance. Je me souviens avoir vu un film qui traitait justement de cette pathologie ; un thriller. Rare que j’en regarde mais j’avais beaucoup aimé si je puis dire. Une meuf qui a plusieurs personnalités qui s’interchangent un peu n’importe quand, plutôt quand il y a un événement un peu incontrôlable ou traumatisant pour la personnalité principale. Là, on l’accusait d’avoir assassiné son amant, un prof de lycée sauf qu’elle était innocente bien sûr et une de ses personnalités, la plus violente ne cessait de venir pour la protéger et faire son enquête toute seule. Bref, le fin mot de l’histoire c’est qu’elle arrive à guérir de ce trouble mais… Je suppose que dans la vie réelle, ce n’est pas comme ça que ça marche. J’imagine que l’on ne peut pas en guérir aussi facilement.
Je finis par me relever sans avoir besoin d’aide, époussetant un peu mes vêtements au passage et me rattachant les cheveux dans le même temps. Je soulève rapidement mon haut pour vérifier mais le pansement est toujours en place et il n’y a pas de tâche de sang, ce qui est une bonne chose. Ce petit coup a eu l’effet d’une bombe, je viens de me rendre compte que je tremble et que j’ai besoin de manger quelque chose assez rapidement. Je n’ai plus envie de me battre, de toute manière, à quoi ça servirait vu la réaction de ce mec. Il m’aurait déjà dévoré tout cru s’il l’avait vraiment voulu donc je vais en partie le croire sur ce qu’il dit.
« Si tu ne comptes réellement pas me sauter à la gorge, tant mieux. T’as faim ? Parce que moi oui. Et faut que je mange tout de suite. »
Parce que je n’ai pas forcément envie de faire un malaise dans les couloirs et surtout pas devant ce type. Me montrer déjà faible comme ça ne me plait absolument pas alors si en plus je perds connaissance comme une femmelette, alors non. Là rien ne va plus ! Sans attendre sa réponse, je commence à me diriger vers la cafétaria de l’hôpital. Je ne pourrais pas attendre d’aller dans un vrai restaurant ; je fais peur à tout le monde sur mon chemin avec mon air livide. Ils devraient avoir l’habitude, ça me le fait à chaque fois qu’on me pompe du sang. En même temps, faut être à jeun au moins 12h avant de faire la prise de sang et j’étais réveillé tôt ce matin alors forcément, maintenant j’ai faim et je fais de l’anémie en plus de l’hypoglycémie. La bouffe n’est pas géniale, mais on va dire que ça va alors je prends le premier truc qui me tombe sous la main et qui fasse bien parti des régimes spéciaux puisque forcément, je dois faire un peu plus attention maintenant à ce que je mange ! Je suis bien suivi par une personne pour m’aider à préparer des repas davantage sain (je cuisinais déjà équilibré avant, mais j’avoue que je mangeais pas mal de poisson cru, et que parfois c’était trop gras ou trop salé sans le vouloir).
« Bon et sinon, toi tu t’appelles comment ? Moi c’est Kenji… »
Je prends mon plateau de mes deux mains tremblantes avant d’aller m’asseoir à une table pour pouvoir engloutir le maigre repas qu’il y a devant moi. Pas que j’ai forcément très envie de faire la parlotte mais bon, si je peux essuyer les plâtres avant que l’autre vénère ne revienne (en espérant qu’il ne revienne pas tout de suite), et que j’ai le temps de fuir accessoirement, ce serait pas mal.
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Mercredi 3 novembre 2020
Ma proposition est sincère. Autant que tout ce que je dis. En fait, à part celle qui ne parle pas, je dois être le plus sincère de tous de ce que j’ai pu comprendre de mes conversations avec le psy’.
Aujourd’hui je n’avais pas des masses envies d’y aller pour pas mal de raisons. Mais, d’habitude, j’apprécie les conversations avec lui puisque ça me fait un peu de compagnie. Je voudrais rencontrer tellement plus de gens !
Je regarde le mec qui s’est redressé.
Même si je suis un peu inquiet pour lui, je préfère continuer à lui sourire. A ce qu’il paraît, ça aide la personne à être plus sereine face à une situation un peu précaire.
Pas grave si ça ne marche pas, au moins j’essaie.
Ce qui est sûr, c’est qu’il ne veut pas de mon aide. Qu’à cela ne tienne, je ne pars pas de toute façon. Alors je peux l’aider si ça ne va pas. Je serais juste à côté !
Il prend son temps, c’est cool. Il ne faut pas se précipiter sinon on peut faire des malaises. Où est-ce que j’ai entendu ça déjà, moi ? Mmh… Ah ! Peut-être d’une infirmière puisque j’ai tendance à être souvent à l’hôpital. Ouais, ça doit être ça.
Je suis trop content ! Je crois qu’il me croit quand je lui ai dit que je ne lui veux pas de mal ! Ouais, ça doit carrément être ça ! Sinon, pourquoi il me dirait tout ça ? C’est carrément une preuve de confiance, ça ! Et même qu’il ne s’en rend même pas compte !
Par contre…
- Hein ? Euh… Ouais. J’suis un des alters de Yasushi. Je sais pas si les autres savent qu’ils en sont, par contre… Moi j’parle pas mal avec l’psy, alors j’ai pu glaner max d’infos ! Pis, à force de m’faire appeler Yasushi, j’ai fini par comprendre, quoi. Ah ! Si tu me dis comment était l’autre dont tu parles, je pourrais peut-être te dire qui c’est ? Enfin... si tu me dis comment il agissait, quoi.
Un peu de nerf !
Je sais que je peux faire mieux que ça. Il faut juste que je me reprenne.
Tout va bien.
Finalement, le mec se relève. Comme je me le suis promis, je reste à côté de lui. Sait-on jamais, quoi. Mais je suis content. Il n’a pas eu besoin de moi.
Franchement, il a clairement la classe ! C’est pas nous qui nous habillons comme ça ! Ça me fait rire un peu. Faudrait qu’on essaie un jour ! Bon, ce n’est pas trop mon style, mais pourquoi pas, un de ces quatre. Une fois ça ne va pas me tuer.
Ouh là ! Ca ne va pas fort, lui !
Je regarde autour… Personne.
Merde ! Je ne sais pas quoi faire ! Je ne peux pas le laisser tout seul et je ne sais pas trop ce qui lui arrive !
Du calme ! Du calme.
Tout va bien. Il ne fait pas de syncope, c’est déjà ça. Puis il a bien pris son temps donc il ne devrait pas tomber tout de suite. Je crois ?
- T’inquiète, c’est pas vraiment mon genre d’attaquer les autres.
Je ris.
Ce n’est vraiment pas mon truc de blesser les autres. Par contre, Yasushi et Anwil, si je ne dis pas de bêtise, ce serait leur truc, ouais. Et pas franchement pour de bonnes raisons pour ce que j’en sais.
Une question. Si j’ai… ?
Merde ! Mais attends-moi, mec !
- Sûr que j’ai faim ! J’pourrais manger pour quatre ! Ou cinq si on veut être exact !
On va à la cafétéria. C’est mieux que rien !
Sur mon plateau, je prends le plus qu’il m’est possible et autorisé de faire. Si besoin, j’essaie de marchander avec les personnes responsables, mais pas trop non plus. Ces pauvres gens n’y sont pour rien s’ils doivent limiter pour que tout le monde en ait.
Après ça, je rejoins le mec dont je ne connais toujours pas le nom.
- Tu manges que ça ?! Faudrait pas que tu fasses un malaise… T’es franch’ment pâle. Attends.
Je prends le premier truc sucré que j’ai pris de mon plateau et le lui tends.
- Tiens ! Y’paraît que pour pas faire de malaise faut pas aller trop vite et manger du sucre.
Je m’assois et commence à manger. J’ai trop, trop faim !
Sérieux, il n’y a quasiment rien à l’appartement et ce n’est pas l’encas de ce matin qui va me caler le ventre. Comment font-ils tous pour se priver de manger tout le temps ?! Je sais bien qu’on a vécu des moments pas cools avec ça, mais quand même !
Je dévore mon repas quand je suis coupé par une question.
Je regarde le mec. Kenji.
J’avale pour sourire :
- Enchanté Kenji ! Moi c’est Anayel ! Le plus joyeux, agréable et bavard de tous les alters de Yasushi. D’ailleurs, je crois même que je le suis plus que Yasushi lui-même. Ah ! Je crois pas que tu m’aies dit comment était celui sur lequel t’es tombé ?
Je réfléchis un peu avant de reprendre. Au pire, je n’ai qu’à prendre les devants et les lui décrire. Il n’aura qu’à me dire après qui c’était.
- D’après ce que je sais, y’a donc moi. Après, en moins chiant, y’a Yumiko. Elle parle quasi pas. J’pense pas qu’ça soit elle si on y réfléchit. Après y’a Yvan. Un obsédé ! Pis les deux plus bagarreurs sont Yasushi, l’hôte, et Anwil. J’crois qu’Yasu a pas envie de rester avec les gens, mais je sais pas trop pourquoi. Et Anwil y veut casser la gueule de tout l’monde avec priorité pour un enfoiré de service. ‘Fin bon, c’est pas vraiment important.
Ouais, le père de Yasushi.
Je dois bien avouer que ça m'enlèverait une bonne épine du pied qu’il ne soit plus de ce monde, puisque, comme ça, on pourrait tous être un peu plus serein. Par contre… je ne suis pas vraiment dans l’optique de souhaiter le malheur des autres. Je me retrouve donc le cul entre deux chaises concernant ce monstre.
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Le garçon dit s’appeler Anayel et il semble être au courant qu’il est un alter, donc une autre personnalité de l’homme que j’ai rencontré tout à l’heure dans ce même couloir. Il m’explique ensuite qu’il y en a d’autres mais il ne sait pas s’ils sont au courant qu’ils sont des alters. J’avoue que je ne pige pas très bien à ces histoires de dédoublement de la personnalité. Et l’autre type qui semble être l’hôte s’appelle Yasushi donc. Euh, que je lui dise comment était l’autre personne que j’ai rencontré pour qu’il puisse me dire qui c’était ? Ouais, okay mais est-ce que ça va vraiment l’aider que je lui dise que le type s’est mis en colère car il m’est rentré dedans, qu’il a osé m’insulter parce que je ne regardais pas où j’allais et que c’était à moi de faire attention alors que lui aussi là, s’il avait fait plus attention, il aurait bien vu que j’étais sur le chemin ! Il lui suffisait donc de me contourner. A croire que les couloirs ne sont pas si larges que ça tss.
« Comment il agissait hum… Il m’est juste rentré dedans et a commencé à vouloir me frapper en m’insultant. »
Je crois que c’est assez bien résumé. Mais sans doute ais-je parlé trop doucement car je ne suis pas certain qu’il m’ait entendu. Il me réitère qu’il n’est pas du genre à attaquer les gens, ce qui m’apaise un peu. Par la suite, sans l’attendre, je partis me prendre de quoi manger un morceau, histoire de me requinquer un peu. Il n’a pas trop mis de difficulté à me rejoindre à me dire qu’il pouvait manger pour cinq. Dois-je en conclure qu’ils sont au moins cinq personnalités dans cette caboche ? Pauvre de lui, déjà qu’en étant qu’un, j’arrive à m’engueuler avec moi-même tout seul alors avoir plusieurs personnalités en soi, ne doit pas être de tout repos. Il semble surpris par la quantité que j’ai prise ; en même temps… Les quantités sont limitées alors bon… Et on va dire que ce n’est qu’un encas jusqu’à ce que je rentre chez moi pour me faire un vrai repas. Sauf que sans m’y attendre, il me tend un truc sucré en me disant que pour éviter les malaises, il faut manger du sucré. Je fais un léger sourire. Amusant et déconcertant, il prend soin d’un inconnu qui avait envie de le frapper quelques minutes auparavant.
« Aucun problème et oui je sais bien qu’on mange du sucré pour éviter le malaise. Je commence à avoir l’habitude. »
Sans donner plus de détails, je vérifie le contenu du truc sucré qu’il vient de me tendre. Mais… Manque de pot pour moi, c’est une brioche sucré aux haricots rouges alors je la lui redonne. Les brioches aux haricots rouges sont bénéfiques en cas d’hypoglycémie sauf que pour moi, c’est fatal.
« Je te remercie mais malheureusement je suis allergique aux haricots rouges ; je vais devoir me passer de cette brioche pourtant appétissante. »
Tout comme sur mon plateau, il n’y a pas de sauce soja pour relever le goût de mes aliments. Je dois donc me contenter de ce bol de riz avec un poisson grillé sans sauce et d’une soupe miso avec du tofu dedans. Chose d’ailleurs étrange, je suis allergique à la sauce soja, laquelle contient du soja et toute sorte de choses mais aucunement au tofu. On n’a jamais poussé les examens plus loin pour savoir quel ingrédient de la sauce me filait des réactions mais dans le doute, il a été préférable de déclarer que j’étais allergique à la sauce soja avec l’ensemble de ses ingrédients.
Et je dois dire que c’est tout un art d’arriver à trouver des sauces aussi délicieuses que la sauce soja pour pouvoir accompagner ses plats. Enfin bref, je mange tranquillement pendant qu’il m’explique un peu plus en détails qui sont les alters de ce Yasushi. Il semblerait que parmi ces alters, deux soient les plus violents/bagarreurs de la bande, dont l’hôte Yasushi. Hum… Alors Anwil voudrait donc casser la gueule à tout le monde. Dans ce cas, est-ce que ce serait lui que j’ai aperçu tout à l’heure. Je penche la tête sur le côté un instant en réfléchissant.
« Alors celui sur lequel je suis tombé m’a hurlé dessus direct comme quoi je lui ai rentré dedans et comme je déteste qu’on me hurle comme ça, j’ai répliqué en le poussant. Il est tombé à terre et m’a rattrapé pour me faire tomber. Il avait une expression de rageux… De ce que tu me dis, Anwil a l’air de correspondre non ? »
Ça me semble tellement irréel de me dire que je parle tranquillement des autres personnalités de ce jeune homme appelé Yasushi avec justement une de ses personnalités. Et en plus, je papote comme ça alors que je n’aurais aucune raison de le faire.
« Je suppose qu’avoir un trouble de la personnalité ne te permet pas de travailler ? Ou peut-être je me trompe… J’avoue que je n’y connais et n’y pige que dalle à tout ça. D'ailleurs, comment peut-on être atteint d’un trouble pareil ? »
Sans doute une question complètement débile mais bon ; autant en profiter qu’il soit a priori le plus sociable d’entre tous pour en savoir plus.
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Mercredi 3 novembre 2020
Même si j’adore manger, ça ne me dérange pas du tout de partager avec d’autres gens. Surtout s’ils en ont besoin ! Moi aussi, mais c’est pas pareil.
Quoi que…
Bref !
Je suis content qu'il ne refuse pas la brioche que je lui tends. J’ai pas fait attention, mais ça ne me dérange pas. J’aime ça, mais ce n’est pas dans le top de ce que j’aime. Alors si ça peut l’aider, c’est tant mieux !
C’est moi ou… ? J’ai l’impression qu’il sourit.
Mmh…
Bah ! Tant mieux si c’est le cas !
Moi, en tout cas, je souris toujours. Sauf quand je suis triste ou qu’on arrive à me mettre vénère, mais c’est autre chose encore.
Je commence à manger pendant qu’il regarde la brioche. J’avoue que je ne comprends pas trop pourquoi il fait ça. Mais, même si je me pose un peu la question, il fait bien ce qu’il veut.
Hein ? Pourquoi il me la redonne ?
Je le regarde en arrêtant de bouger.
Ah ! Oui, s’il est allergique, c’est normal qu’il n’en veuille pas. C’est dommage, mais c’est comme ça.
- Pas grave. Y’a autre chose qui te fait envie ?
Même s’il a l’habitude de manquer de sucre, c’est bizarre qu’il n’ait pas pris de sucré sur son plateau.
D’ailleurs…
…
Nan, je vais pas lui demander pourquoi il a l’habitude. C’est trop personnel. Puis, s’il n’avait pas de problème de santé, il viendrait pas à l’hôpital. Sauf pour visiter quelqu’un. Idée écartée par le pansement que j’ai vu tout à l’heure.
Je hausse les épaules et passe à autre chose.
J’adore parler des autres et de mettre les points sur les i. Je veux dire, je trouve ça mieux qu’on se fasse pas de fausses idées sur Yasushi, les autres et moi.
Ouais, on n’est pas comme les autres. Mais on est là et je crois qu’il est impossible qu’on se cache.
Alors, pour savoir qui Kenji a vu tout à l’heure, ça ne me pose aucun soucis de lui parler de nous et d’essayer de deviner.
Pour le moment, ça se jouerait entre Yasushi et Anwil je pense. Ce n’était pas moi et je ne vois pas Yumiko faire quoi que ce soit à qui que ce soit. Quant à Yvan, je n’ai jamais entendu parler d’un accès de violence venant de lui. Après, je peux me tromper. Ca m’arrive aussi.
Kenji penche plutôt pour Anwil, lui. Mais…
- Ben, c’est possible, ouais. Mais j’ai un doute. Anwil il insulte pas de c’que je sais. Et même s’il est violent, il a du sang froid il m’semble. Par contre, c’est carrément le style de Yasu de fait c’que tu m’as dit. Surtout s’il était vénère en vrai.
Personnellement, je pencherais donc pour que ce soit Yasushi que Kenji a rencontré. Mais comme je n’ai aucune preuve, je ne peux pas le lui certifier. C’est qu’ils sont compliqués à ne pas confondre Anwil et Yasushi !
Je ne pensais pas que Kenji puisse être aussi curieux !
Mais ça me fait plaisir qu’il me pose des questions sur Yasushi et nous autres. C’est comme s’il voulait nous comprendre. Ca c’est trop cool !
Puis, je préfère qu’il demande à moi qu’aux autres, j’avoue.
- Pas grave si tu connais pas, j’suis content qu’tu veuille en savoir plus. Du coup, t’as raison. Pas possible de travailler. Ahah ! J’ose même pas imaginer si Yumiko sortait pendant l’boulot ! Mais c’est chiant parce que du coup Yasushi peut pas faire c’qu’il veut et il tourne un peu en rond. J’crois qu’il va pas trop bien en c’moment, mais j’suis pas sûr. Pour c’qui est de comment on est apparu…
Comment puis-je le dire ?
Je ne peux pas déballer la vie de Yasushi juste comme ça. Et je ne sais pas si c’est comme ça pour tout le monde.
Je soupire un peu.
Je peux toujours faire ça :
- Je sais pas trop pour les autres, mais moi j’suis apparu quand Yasushi se f’sait torturer par son père. Un enfoiré de service, si tu veux mon avis. C’était y’a genre quatorze, quinze ans, si je dis pas d’conneries. Les autres c’était à peu près pareil à quelques détails près, avant et après moi. Dooonc… C’es p’têt’ les traumas qui nous font sortir. J’sais pas trop.
Je ne sais pas si j’ai vraiment répondu à ses questions. Questions difficiles, mais auxquelles ça ne me dérange pas de répondre.
Bien franchement, ce n'est pas moi que ça touche, mais Yasushi. Alors ça ne m’empêche clairement pas de manger.
Ouais, j’ai vécu de la douleur à la place de Yasushi, mais ce n’est pas la fin du monde non plus. Je ne veux pas que ça m’empêche de vivre !
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From misunderstanding to fight
« Hum, hum ne t’inquiète donc pas pour moi. Je mange toujours peu après un bilan sanguin. Je me rattrape une fois chez moi. »
Je ne veux pas qu’il s’inquiète davantage pour moi et préfère qu’il mange son plateau entier que de partager. A vrai dire, je n’aime pas trop quand on partage sa nourriture avec moi. Ça a toujours été comme ça ; même avec mon frère et ma sœur, je ne voulais pas qu’ils me donnent un bout de leur plat tout comme je n’ai jamais aimé partager mon plat. Ca m’horripile et c’est bien le genre de truc qui me fait partir au quart de tour rapidement et inutilement soi disant en passant. Enfin bref, j’ai refusé poliment, je pense qu’il ne va pas insister davantage et c’est tant mieux.
Ensuite, je lui demande un peu plus de précisions quant à ces alters, l’hôte et par contre, il pense que ce n’est pas Anwil que j’ai rencontré car il n’est pas du genre à insulter les gens. Donc j’aurais rencontré directement l’hôte. Plutôt intéressant.
« Hum d’accord je vois, ça se peut effectivement qu’il ait été vénère pour quelque chose. »
Je dirais par déduction que si on n’est pas fan du style veste rose et tout, à sa place, je crois que je me serais énervé aussi. La discussion continue et mes soupçons sont donc vérifiés : il ne peut pas travailler à cause de tous ces alters. J’avoue que je ne sais pas comment je réagirais si tout d’un coup, je ne pouvais plus travailler. Fin techniquement, j’ai été mis aux arrêts pendant quelques semaines mais contre ma volonté. Et en fait, je gérais certainement affaires depuis ma chambre d’hôpital, donc on ne peut pas dire que j’ai été réellement arrêté. Ha je me souviens que les infirmières m’engueulaient beaucoup et comme d’habitude, je n’écoutais pas les conseils. Donc l’hôte tournerait en rond, ce qui est assez compréhensible. Pourtant, ça doit bien se trouver un petit job en mode hyper tranquille et qui ne risquerait pas à tout instant de faire apparaître un des alters. Je connais un mec qui certes n’est pas atteint de ce trouble mais qui a des problèmes aussi et il peint. Peut-être que si Yasushi trouve une activité qui le détende et qui pourrait lui rapporter en plus, ce ne serait que bénéfice.
Finalement, Anayel veut bien m’expliquer comment lui et les autres sont apparus, pour ce qu’il en sait. Je fronce les sourcils en entendant que Yasushi s’est fait torturer par son père et que c’est comme ça que cet alter est apparu. Hum… Donc, à cause de tout ça, il semblerait que tous ces alters se soient manifestés avant ou après. Je n’arrive pas trop à imaginer un parent torturant son enfant ; comment peut-on oser faire ça ! Certes, mon enfance n’a pas été toute rose, surtout avec ma mère… Mais à sa décharge, elle avait Huttington et devenait un peu trop facilement irritable et violente envers moi surtout.
« Hum je vois… Je ne suis pas bon en psychologie humaine mais je ne me doutais pas que par un trauma un peu de ce genre, un enfant pouvait développer un trouble de la personnalité. Je veux dire, j’en ai lu des faits divers de torture d’enfants mais jamais un cas pareil n’avait été relaté. »
Je suppose que l’on a tous une certaine limite quant à la sensibilité. Forcément, je ne peux pas comprendre tout ce que l’hôte et ses alters ont subi pendant leur plus jeune âge et je parais parfois condescendant mais ce n’est pas volontaire. Juste, je ne connais pas et parfois, ça me parait trop gros.
« Au fait, tant que j’y pense. Tu as dis donc que ce n’était pas possible de travailler mais… il n’y a pas une activité qui vous apaise à peu près tous et qui pourrait être rentable ? Genre, je sais pas si vous aimez l’art, le dessin ou quoi mais pourquoi pas mener sa réflexion dans des activités qui soient susceptibles d’être rentables sans forcément bouger de chez soi. »
C’est évidemment qu’une proposition comme ça, lancée un peu à l’aveuglette mais je suis comme ça. Je termine mon plateau repas, regardant l’heure rapidement. Oups, Ryuji va m’attendre… Il vient rarement à Sanda mais aujourd’hui, il a voulu venir me chercher. Même si, au final, c’est moi qui vais le ramener puisque je suis venu en voiture mais bon. Disons que ça nous permet de passer de vrais moments entre frangins comme ça. Et comme si ce petit génie m’avait entendu, le voilà qu’il vient dans notre direction avec son sourire débile : https://www.zerochan.net/1156947
« Kenji a-ni-ki ! »
« Ha gosh Ryuji t’es déjà là ? J’avais pas vu l’heure désolé. Reste pas debout je te prie, assieds-toi. Promis, je te ramène bientôt à la maison. »
« Ca… va t’en-fais pas… C’est ton… ami ? »
Ses mots sont presque hachés. Ca ne fait pas une année environ que ses symptômes ont débuté mais malheureusement, ça va assez vite chez lui. Ca a commencé par une sorte de perte de motricité au niveau de la parole. Tout le reste fonctionne normalement mais il arrive que les symptômes n’arrivent pas dans le même ordre, d’un patient à un autre.
« C’est une connaissance pour être plus exact. Je l’ai rencontré tout à l’heure… T’es vraiment frappadingue d’être venu comme ça, pour qu’on rentre ensemble hein… Surtout de te taper tout le trajet depuis Kobe alors que tu ne le fais jamais. »
« Hum hum… Nee-san… m’a posé… avant de partir… à Osaka. »
« Ha je vois… Bon au moins, tu auras économisé de l’énergie. Bref, Ryuji, je te présente Anayel. En fait, c’est un alter d’un gars prénommé Yasushi. C’est compliqué. »
« En-chan-té Anayel ! T’fais quoi… dans la… vie ? »
Je ne compte pas non plus imposer mon petit frère au jeune homme, très longtemps.
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Mercredi 3 novembre 2020
La conversation a été détournée vers Yasushi et ses problèmes. Donc ses alters dont moi.
C’est bizarre.
En plus de ça, n’est-ce pas un moyen de détourner mon attention d’un problème qu’il tente de cacher ?
Je ne suis personne pour lui dire qu’il devrait faire plus attention à lui. Alors, autant satisfaire sa curiosité et lui donner mon avis à propos de la personnalité qu’il a rencontré avant.
Entre Yasushi et Anwil, il n’y a vraiment pas grandes différences de ce que j’en sais.
Avoir une certitude après coup est compliquée, même si j’aimerais en avoir une. Après tout, Yasushi est effectivement plus apte à s’énerver à propos des vêtements qu’il porte que Anwil. Puis, serions-nous là si ce n’était pas notre hôte ?
En tout cas, je veux croire qu’il a croisé Yasushi et non Anwil car voir le second peut se montrer très dangereux pour le peu que j’en sais.
Cette conclusion en tête, une autre question est formulée à propos du TDI.
Non, deux questions en fait.
D’abord concernant le travail qui nous a été clairement interdit puisque nous sommes trop “instables”. Trop sujets à changements je crois. Au pire, la raison importe peu. Le résultat est le même. Nous sommes comme un lion en cage.
Puis, à propos de l’apparition du TDI.
J’ai préféré ne parler que de ma “naissance”. Je ne connais pas vraiment les circonstances pour les autres, même si je peux deviner qu’elles étaient liées aux quelques mésaventures qui se sont passées il y a longtemps.
Le mot ne me paraît clairement pas assez fort pour décrire ça…
Trouver une activité qui nous plaise à tous ?
- L’idée n’est pas mauvaise.
Mais est-ce possible ?
Ce serait bien qu’on arrive à faire une liste de ce qu’on aime ou pas pour faire le point.
Ça paraît compliqué…
Je ne crois pas qu’on va pouvoir en parler plus.
En le voyant regarder l’heure, je pense à ça. Normal, non ?
Je m’attends à ce qu’il me dise qu’il va partir, mais quelqu’un vient. Une personne qu’il connaît.
En observant et écoutant, je pense comprendre qu’ils doivent être frères ou se considérer comme étant frères.
Celui qui vient d’arriver a un style vestimentaire qui me plaît beaucoup. Je crois que je vais aimer le rencontrer s’il est comme moi. Son nom est Ryuji.
Même s’il bégaie, je trouve qu’il a une voix assez plaisante. Mmh… Ça me turlupine cette façon de parler.
Je fais un signe de main pour saluer cette personne.
Rapide, mais assez pour qu’il me voit avant que la conversation se détourne de ma personne avant d’y revenir.
Ne sont-ils pas incroyables ces deux-là ? A m’ignorer avant de me parler, m’ignorer encore une fois, et me parler pleinement. Je crois qu’il y en a quelques-uns qui n’auraient pas aimé. Moi, je m’en fous.
Cette fois, je suis présenté. Enfin ! Je n’aime pas trop être mis de côté, même si je fais comme si ça ne me fait rien.
- Salut, Ryuji-san. Moi aussi j’suis content de te rencontrer. Mmh… Comme je disais avant à ton frère, je travaille pas à cause de mon TDI. Le psy veut pas. Mais, même si ça m’a l’air difficile, j’crois que son idée de trouver un truc est super intéressante. Et toi ? Tu travailles ? Ça doit être difficile avec ton bégaiement, non ? Ah ! Pardon, t’es pas obligé de répondre si tu veux pas.
Je crois que je commence à ressentir un sorte de fatigue. Ce n’est pas très étonnant : je suis en pleine digestion et à tous les coups mon corps manque de sommeil. … Entre autres. Bref ! J’espère tenir un peu plus longtemps. J’aime bien parler avec ces gens-là.
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Anayel n’exclue pas non plus la possibilité de voir s’il n’y a pas une activité qui pourrait plaire à tout le monde et peut-être même d’en faire une affaire lucrative. Comme je ne connais pas trop les autres alters, j’avoue ne pas savoir si tout le monde pourrait être d’accord ou pas. Enfin donc mon frère arrive et après un petit moment à discuter entre nous, nous remettons le jeune homme dans la discussion. J’explique en murmurant la signification de l’acronyme TDI car Ryuji ne doit pas le savoir non plus. Anayel est super enjoué et je regarde mon frère, en haussant les épaules. S’il veut lui expliquer, il le peut mais juste qu’il ne me mette pas dans la conversation sur cette maladie. Ce n’est pas un tabou mais je n’aime pas non plus spécialement en parler.
« Mon frè-re Kenji a… semble-t-il tou-jours de très bon-nes idées haha… J… Je travaille effecti-vement… Raaaah A-ni-ki ex-pli-que s’il-te-plait ! »
Le voyant se débattre à essayer d’aligner sa phrase alors qu’il a beaucoup de mal avec cette espèce de bégaiement, je soupire un instant. Ryuji va bien chez l’orthophoniste pour ces problèmes de diction mais les muscles de la bouche font parfois n’importe quoi et ça lui fatigue rapidement la mâchoire de trop parler. Alors quand il doit expliquer un truc qu’il ne peut pas, il se sent très frustré et il en arrive parfois à faire des crises de colère… Avant, il n’était pas comme ça. Ryuji a toujours été un jeune homme au tempérament calme et cool, ne se mettant jamais en colère pour la moindre contrariété. Maintenant, ce n’est plus pareil.
« Okay, okay… Ne t’énerve pas, je vais expliquer. »
« Grrmll merci… »
« Ce n’est pas quelque chose dont j’aime vraiment parler puisque ce que je vais te dire, touche en fait ma sœur, Ryuji qui est ici et moi-même. »
Je prends une pause car je dois de nouveau refaire avec les démons du passé quand notre père nous a tout expliqué. Quelques temps après que notre mère soit décédée ; quand nous étions à peu près tous en âge de comprendre. Ryuji me tient la main car il sait que c’est une étape difficile que de parler de ça, pour moi. Ca m’a anéanti le jour où ce dernier a commencé à avoir les symptômes et qu’on a eu le diagnostic officiel.
« Ce que Ryuji voulait te dire, c’est que oui tout d’abord, il travaille. Il donne des cours de japonais à des élèves sourds-muets donc tout se fait en langage des signes. »
Un truc que j’aurais bien aimé apprendre et chaque fois que l’on me demande son métier, je me sens fier de lui. C’est sa couverture officielle même si de toute manière, à l’annonce du gêne activé de Huttington, père l’avait déjà mis de côté. Assez compréhensible en soi.
« Sinon et bien pour ce bégaiement qui n’en est pas exactement un… Nous avons tous… la maladie de Huttington en nous. Sauf que c’est Ryuji, ça s’est déjà activé. En gros, c’est une maladie génétique neurodégénérative. Elle tue à petit feu et hum… Comment expliquer ça… »
Je ne sais pas comment tout expliquer de cette maladie tant elle est complexe. Elle me fait peur, je l’avoue. Elle me fait très peur car je ne m’imagine pas un jour perdre ma motricité, devenir fou parce que je changerais sans cesse d’humeur et m’en prendre à ceux que j’aime parce que je ne pourrais pas me contrôler. Non, ça m’est vraiment insupportable. Je déglutis lentement ma salive avant de reprendre.
« En clair… Au fil du temps, tu perds toute ta motricité et tu finis dans un fauteuil roulant, voire dans un état de légume jusqu’à ce que la mort t’emporte car tu ne pourras plus respirer, plus manger, plus rien. Cette maladie agit aussi bien sur le physique que sur le domaine psychologique… C’est incurable et les seuls traitements qu’il y a, sont là uniquement pour atténuer les symptômes. Mais la durée de vie se situe entre 10 et 20 ans maximum. »
Comment pourrir l’ambiance d’un seul coup mais que veux-tu. Ryuji tenait à expliquer l’histoire et même si ça ne m’enchantait guère, ses regards noirs furtifs de temps à autre ne m’ont pas trop laissé le choix. Je ressens un peu la fatigue par contre qui arrive subitement et un bâillement fend mon visage en deux.
« Je suis désolé Anayel mais je pense on va te laisser. J’avoue que le bilan sanguin de ce matin m’a un peu achevé… »
Avant même que je ne crie gare, Ryuji était déjà entrain de demander le numéro de téléphone du garçon.
« Ouais fin tu fais quoi si quand t’envoie un message tu tombes sur un autre alter ? »
« Pas pour moi… pour-toi nii-san. »
« Okay dis comme ça, je ne dois pas avoir d’amis… »
Soupirant en le regardant faire. Je repris ensuite mon téléphone puis le mis dans mes poches.
« Au pire, quand t’es de sortie fais moi un signe hein… Je dis pas que je serais tout le temps dispo hein mais voilà quoi. Bon, à la revoyure. »
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Mercredi 3 novembre 2020
Cela fait combien de temps que je n’ai pas autant apprécié parler de tout et de rien avec quelqu’un d’autre que le psy ?
Je veux dire, la plupart du temps, les autres font fuir le peu de personnes qu’ils me permettent involontairement de rencontrer. Et, là, je suis juste avec des personne qui sont assez tolérantes pour ne pas me mettre sur le dos les conneries des autres. C’est hyper rafraîchissant !
Bon, là ce n’est pas franchement facile puisqu’on passe sur un point assez frustrant du TDI. Surtout pour Yasushi. Je le sais. Y’a qu’à voir l’état de l’appartement et ce qu’il s’est passé avant pour s’en rendre compte.
Mais ça me rend curieux à propos de Ryuji qui a son lot de problèmes. Je veux dire… ça ne doit pas être simple tous les jours avec cette manière hachée de parler.
Les deux frères, de ce que je vois en les regardant un peu, sont proches. Ils se regardent souvent et, surtout, Kenji vient en aide à Ryuji quand celui-ci le lui demande alors qu’il éprouve des difficultés à éclairer ma lanterne.
Je ne pensais pas si bien dire en pensant qu’il avait son lot de problèmes. Une maladie dégénérative qui ne lui donne que vingt ans maximum à vivre maintenant que les premiers symptômes sont apparus… La vache ! Ca envoie du lourd !
J’ai beau me dire qu’il peut au moins travailler, cela ne rend pas la chose moins grave. Aucune de nos histoire n’est à envier je crois.
J’ai l’impression qu’il y a un gros malaise du côté de Kenji. Mais je ne sais pas comment l’expliquer. Et même si je crois deviner que c’est à cause de ce qu’il me dit à propos de la maladie, je ne suis pas certain de comprendre pourquoi. Je n’ose pas demander. Je ne veux pas enfoncer le couteau dans la plaie. Je ne suis pas curieux à ce point.
Finalement, les voilà sur le départ. Je comprends les raisons qui font qu’il faut se dire au revoir. Mais… Je ne sais pas… Je n’arrive pas à être plus joyeux que déçu.
A côté de la solitude forcée que les autres m’obligent à vivre la plupart du temps, je ressens un grand réconfort de parler de tout et de rien avec des personnes que je viens de rencontrer. Du coup, j’ai vraiment l’impression que leur départ est trop pressipité. … Comme une fuite !
Ce sentiment est atténué par la proposition de Ryuji. Je retrouve donc un sourire rayonnant. Quoi que… peut-être un poil gêné. Je prends quand même un morceau de papier sur mon plateau et un crayon que j’avais dans la poche de mon manteau pour noter dessus le numéro de l’appartement. Je n’ose pas trop prendre les affaires des autres de crainte de faire une bêtise et qu’on m’en veuille par la suite.
Je donne le papier à Kenji qui est le vrai destinataire :
- Moi et les autres, on traîne pas trop à l’appart, mais comme on a pas de portable, je peux pas trop t’en donner un autre. Au pire, on est souvent ici, donc on pourra p’t’être se revoir comme ça. En tout cas, ce sera avec plaisir.
J’ai vraiment envie de tisser un lien avec ces personnes.
Pour moi, c’est difficile de les voir partir, mais je les laisse faire en leur faisant un signe de la main avec un grand sourire.
Et maintenant qu’ils ne sont plus là ? Qu’est-ce qu’on fait ?