(edit post rp mais tamako mentionne souvent qu'elle veut se foutre en l'air à divers moments du rp en gen donc si ça vous trigger faites attention!)

Tu savais que ta journée allait être catastrophique lorsque tu as commencé à pleurer presque immédiatement après t’être réveillée.

Tu t’es levée à dix-sept heures, avec onze très belles heures de sommeil à ton actif. Rien que de voir l’heure affichée sur ton téléphone à ton réveil a suffit à te déprimer. Comme d’ordinaire, après avoir dormi plus de dix heures, tu as ressenti une extrême fatigue qui restera sûrement jusqu’à la fin de la journée (ou dans ce cas précis – la fin de la matinée prochaine). Tu t’es étouffée en fumant ta cigarette parce que tu n’étais pas bien réveillée. Tu t’es demandée pourquoi tu t’es mise à la clope, parce que c’est vraiment de la merde et tes parents t’ont toujours dit de ne jamais y toucher – puis tu t’es souvenue que c’était pour combler l’herbe et la cocaïne. Tu t’es donc rappelée de la cocaïne, et que bien que tu sois complètement guérie, ça te manque, ces quelques moments où tu te sentais heureuse.

Tu as fini ta cigarette en pleurant, parce que tu aurais aimé que rien de tout ça n’arrive et qu’au final tu aurais vraiment dû te foutre en l’air avant le lycée, que déménager au Japon n’était pas une si bonne idée que ça et que c’était mieux quand tes parents te laissaient rester dans ta chambre toute la journée.

Après avoir fini de pleurer, tu as essayé de te changer les idées en allumant la console tout en scrollant Twitter, obligeant la dizaine d’abonnés sur ton compte privé à subir tes idées noires. Tant pis, tu supprimeras les tweets lorsque tu auras les idées claires. Idées claires qui n’arrivent pas même en essayant de les remplacer par des tweets marrants ou des vidéos de chats – accompagnés par un semblant de concentration en jouant à des jeux de combat pour lâcher ta frustration.

Tu détestes faire ça, mais peut-être qu’aujourd’hui – juste aujourd’hui – tu peux te permettre d’aller boire un peu seule. L’alcool, c’est un bon moyen pour toi de faire passer ces horribles journée, puisque bizarrement, tu n’es pas du genre à déprimer lorsque ivre. Tu sais que tu vas encore trop boire et qu’au final, la seule chose qui va en découler est certainement un lendemain matin désagréable après avoir tout vomi en rentrant chez toi, mais au moins, tu seras passé à autre chose. Sûrement. De toute façon demain tu ne travailles pas non plus.

Lorsque tu arrives, ça ne te prend pas longtemps de commander un verre de Sangria. Avant toute chose, tu prends une photo du verre mais décides de ne pas la poster après réflexion – tu as peur qu’on retrouve le bar et que quelqu’un t’empêche de t’intoxiquer, connaissant tes mauvaises habitudes. Peut-être que tu la postera plus tard. Ou que tu la supprimera. Tu entends des gens s’amuser derrière – le bruit diminue à chaque verre que tu bois, et tu ne t’en plains pas. Ton cerveau aussi, est de moins en moins bruyant.

Tu sursautes presque lorsque quelqu’un décide de s’inviter à tes côtés. Ah, c’est une mauvaise idée. Tu sais que tu deviens trop bavarde lorsque tu es ivre, et tu as peur de ce que tu pourrais dire à un inconnu.

« Toi aussi on t'a posé un lapin ? »

Un lapin ? Rien de ça. Ça fait longtemps que tu n’as pas eu de rencard, d’ailleurs. Tu as eu quelques aventures au Japon, mais rien de bien concret. En même temps, moi non plus, je ne voudrai pas de moi. Peut-être que tu es vouée à rester seule toute ta vie – on t’a déjà dit que tu étais un bon coup d’un soir, tu n’as qu’à te contenter de ça et adopter des chats. Le terme de vieille folles à dix mille chats ne t’est pas aussi effrayant que certains peuvent penser…

« J’aurai bien aimé. »

Tu paies un peu plus attention à lui. C’est un garçon, dans ta tranche d’âge et qui semble très bien habillé. Tu ne savais pas qu’il fallait se mettre sur son trente-et-un juste pour aller à un date. Sa tenue contraste complètement avec la tienne – un t-shirt blanc avec écrit « i did not ask to be born » pas très bien repassé et tes tongs un peu abîmées. À quoi bon te prendre la tête avec une tenue si c’est juste pour picoler toute seule ? Enfin, tu aurais dû rester seule. Plus tu le regardes, plus tu as l’impression que sa tête te dit quelque chose.

« Ah, t’es le mec sur Internet. Daishi truc. »

Tu ne réfléchis même pas au « truc », le mot est juste sorti tout seul. Honnêtement, tu te fiches de savoir si c’est lui ou si tu vois juste mal à cause de l’alcool. Si c’est certes un influenceur plus ou moins connu (en tout cas, en tant que personne qui passe dix heures par jour sur les réseaux sociaux, pour toi il l’est), les vlogs et les tenues over the top ça te passe complètement au dessus.

« Faudra s’en remettre. Peut-être qu’il ou elle t’a vu de loin et a pris peur, qui sait. Ça arrive à tout le monde, même aux mecs avec des milliers d’abonnés. »

Tu ne considères pas ta phrase comme une pique – s’il le prend comme ça, ça veut dire qu’il a un sacré égo. Il compensera pour le tien, s’il veut vraiment taper la discute. Tu termines ton verre puis fixes le fond un moment. Recommander devant lui alors que ton ivresse commence à se voir sur ton visage n’est peut-être pas une bonne idée.

Un sourire se dessine lorsque tu mentionnes son nom. Normal. Tu n’es pas du tout une abonnée cependant – tu n’aimes pas le principe de suivre toute la vie d’une personne en particulier et d’en développer une relation parasociale – tu en as déjà une avec tous tes personnages préférés des gachas auxquels tu joues. Il y a moins de chance qu’ils cachent quelque chose derrière tous leurs filtres Instagram et leurs montages épileptiques pour captiver l’attention des spectateurs.

« Non. Je te connais parce que je traîne sur Internet, c’est tout. J’aime pas trop les vlogs et tout ça, donc je m’en fous. »

Ah… C’est toujours comme ça, il faut que tu arrêtes de répondre à des questions lorsque tu es dans cet état – tu oublies de filtrer tes pensées. Tu marmonnes « ah, je veux dire... » avant de décider de ne pas t’enfoncer. Parler dans cet état est fatiguant – tu n’es pas encore ivre mais tu n’es plus assez sobre pour te rappeler comment tenir une conversation agréable – ou en tout cas, où tu n’as pas l’air méprisante. Ahh, j’ai mal à la tête. Même dans cet état je réfléchis trop. Sortez moi de là…

Il ne prend pas mal ta remarque et la tournes même comme un compliment. Tu te doutes que c’est du second degré, mais tu te demandes si ce n’est pas vrai, au final. Tu ne sais pas s’il a déjà évoqué publiquement une ancienne relation amoureuse, mais devoir s’exposer à des milliers de gens doit être terrifiant. C’est bien quelque chose que tu haïrais – tu pries de tout ton cœur que ton âme sœur ne soit pas une célébrité. Tu penses bien que Daishi n’est pas encore assez connu pour avoir des paparazzi à ses trousses, mais c’est terrifiant de penser au fait que quelqu’un pourrait prendre une photo de vous deux et la poster demain sur Twitter.

« Ça fait peur, de s’afficher en public. »

Tu n’es pas vraiment d’humeur à rire et réponds presque sèchement à sa boutade – peut-être qu’il ne peut pas comprendre. Après tout, pour faire ce genre de contenu, il faut adorer les caméras. Tu ne sais pas si une personne introvertie lui plairai, elle serait sûrement ennuyante et moins instagrammable.

«Qu'est-ce j'peux t'offrir my lady ? »

Lorsque tu entends cette phrase, tu ne peux pas t’empêcher de penser à toutes les histoires d’horreur que tes amies ont vécu, et marques une très, très longue pause. Après tout, à la base, il était ici pour draguer quelqu’un – et tu es là, seule. Une proie facile en somme. Étrangement, tu n’as jamais été dans cette situation dans le passé et, couplé avec quelques grammes en trop dans le sang, tu as du mal à réagir immédiatement. Tu vas mentir, comme on t’a dit de faire, et il va sûrement le réaliser puisque si ce n’était pas un mensonge tu aurais répondu sans attendre.

« J’ai une copine. » Mensonge. « Je compte pas remplacer la demoiselle qui t’a abandonné. »

N’empêche, tu aurais bien aimé avoir dit la vérité. Peut-être que si tu avais un partenaire, tu serais juste en train de pleurer et de te plaindre au téléphone au lieu de prendre le risque – que tu avais oublié – de boire seule. Même une relation à longue distance, à l’autre bout du monde, ça t’aurait suffit. En attendant, tu es obligée de faire subir tout ça a tes treize abonnés sur ton compte Twitter privé. Ahh, penser à ça te déprime, tu as l’impression d’être dans un cercle vicieux. Dès que tu commences à réfléchir, tu finis inéluctablement par te souvenir de l’enfer dans lequel tu vis depuis que tu es née.

« Cela dit, si ça te gêne pas, je veux bien un Manhattan. »

Tu ne sais plus combien de verre tu as bu, mais tu as l’impression que dès que tu arrêtes, ton cerveau recommence à faire des siennes. Peut-être qu’il faut juste que tu boives jusqu’à-ce que ton corps lâche – définitivement.

Vidéos sur des métiers atypiques ? Tu ne l’admettras pas à haute voix, mais c’est une bonne idée, de donner de la visibilité à des emplois que les gens connaissent peu, surtout lorsqu’on a déjà une communauté établie, qu’importe son âge. Tu te demandes si les bars à chats sont atypiques. Au Canada, ils l’auront sûrement été. Au Japon, un peu moins. Ton métier n’est pas atypique en soi – tu es juste une serveuse comme une autre. C’est un peu égoïste, mais tu préfères que ton lieu de travail ne soit pas partagé sur Internet de cette façon – tu aimes bien le fait que c’est une sorte de havre de paix pour les adultes fatigués de la vitesse à laquelle Kobe bouge.

Tu ne sais pas comment prendre le fameux ‘t’es pas mon style’. D’ordinaire, tu aurais essayé de contre-attaquer avec quelque chose de blessant, mais sur le moment, tu es juste rassurée qu’il n’ait – visiblement – aucune mauvaise intention. Et puis franchement, il n’est pas du tout ton style non plus. Trop flashy, trop bavard, trop bruyant. Tu retiens un ‘c’est réciproque’ – à quoi bon ? Tu as déjà établi que tu ne voulais pas de lui.

« Elle refuse que je tente de la draguer, mais elle accepte quand même le verre ! Elle est pas mal celle là. Ne sais-tu pas que tout à un prix dans la vie ? »

Il sourit – la phrase ne te fait pas rire du tout, mais soit. Tu préfères ne pas réagir puisqu’il prend de toute façon ta commande. Tu le regardes de loin et ne quittes pas le verre des yeux – juste pour être sûre. Honnêtement, tu n’as même pas si peur : tu fais ça par habitude, mais tu t’en fiches qu’il te kidnappe et te tues ou quelque chose comme ça, ce n’est pas comme si tu avais particulièrement envie de vivre – encore moins aujourd’hui. Tu regardes le verre qu’il fait glisser devant toi. Tu as envie de le boire cul sec pour passer à autre chose, mais tu n’as pas envie d’avoir l’air vulgaire.

« T'es bien sur la défensive. Je veux pas de problèmes tu sais. Juste passer une soirée sympa. Même si ça n'a pas l'air d'être ta préoccupation. Pourquoi tu es venue ici ? J'suis curieux ? Qu'est-ce qui est pire qu'un lapin ? »

Hah, curieux. Quelle blague. Plutôt mourir que de lui dire la vérité. Tu n’aimes pas te plaindre, et tu ne vas surtout pas le dire à quelqu’un comme lui. Qu’est-ce que tu vas lui dire ? Il faut une bonne raison pour venir ici seule pour boire sans modération. Quelque chose de pire qu’un lapin… Il y en a tellement, des choses pire que ça. Mais ce sont sûrement des choses qui n’ont aucune importance à ses yeux. Tu pourrais dire que ta famille te manque – tu ne sais pas si ça serait un mensonge ou pas.

Franchement, tu fais de ton mieux, mais voir Violette et Lance avancer sur leurs projets pendant que tu penses à te tailler les veines au moins une fois par semaine est déprimant. Tu prétends être heureuse pour Violette qui a d’excellentes notes au conservatoire, mais ça ne t’intéresse pas du tout, parce que ça te rappelle que tu ne seras jamais à son niveau. Le sourire que tu affiches tous les mois lorsque tu es forcée à les appeler semble de plus en plus forcé, tu as de moins en moins envie de retourner au Canada. Du coup, au final, c’est un mensonge.

Tu n’as pas perdu ton travail – à vrai dire, tu es assez heureuse de ton emploi, c’est une des rares choses ici qui te plaisent. Tu ne t’es pas faite larguer non plus, ça aurait été stupide de dire ça après avoir menti sur une relation amoureuse. Tu ne t’es pas faite virer de chez toi, tu paies ton loyer à temps et n’as jamais cassé quoi que ce soit, tu te considères comme une bonne locataire. Et tu n’es pas alcoolique, d’ailleurs, même si on dirait. Ça ferait bien trop d’addictions en seulement vingt-deux ans sur Terre. Plus tu y penses, plus la raison pour laquelle tu es ici te semble stupide. Tu es juste un peu plus triste que d’habitude. Raison de plus pour ne pas le dire à ce cher Daishi.

« Plein de choses sont bien pires que ça. C’est le prix du Manhattan ? »

Tu essaies de gratter du temps pour former un mensonge cohérent, mais au final, tu n’es pas une très bonne menteuse. Tu te demandes si tes parents ont déjà deviné que tu mentais sur ton état actuel. Au final, tu peux juste dire la vérité – ou au moins la moitié de celle-ci. Tu n’as pas envie de dire que tu es triste et que tu espères qu’avec un peu de chance le Manhattan sera le verre de trop et que tu n’ouvriras plus jamais les yeux, il risque de faire quelque chose d’idiot genre, s’inquiéter, dire que la vie mérité d’être vécue, que c’est juste une mauvaise passe de ta vie, que les gens autour de toi seront tristes.

Tu en as marre d’entendre ce genre de conneries sur des comptes Twitter wholesome ou je sais pas quoi, dire que tu es une survivante et tutti quanti. Tu ne l’as jamais fait parce que tu es une lâche, c’est tout.

« J’avais juste besoin de me changer les idées. »

C’est vrai – tu as besoin que ton cerveau se taise. Tu sais que tout ce que tu dis est vrai, mais tu ne veux plus l’entendre. Et tu n’as pas besoin de l’entendre de la part d’un influenceur que tu connais à peine. Tu ne sais pas s’il se soucie des autres, mais quand quelqu’un dit qu’il a envie de se foutre en l’air, les gens ont tendance à paniquer. Et c’est fatiguant. Tu ne veux pas te fatiguer, ça ne se mêle pas très bien avec ta surconsommation d’alcool. Tu prends une gorgée avant de prendre une grande inspiration.

« Ta soirée sera pas très sympa si tu restes avec quelqu’un comme moi. Tu sais que le bleu ça représente la loyauté et ces conneries ? Ça représente aussi la dépression. Baby blues, blue monday et je sais pas quoi. Je suis trop déprimante quand on traîne avec moi. Dois y avoir plein d’autres bars sympa ici, sûrement avec des filles qui te plairont plus que moi, et qui seront plus agréables. »

Ah, tu as encore été hostile. Il va sûrement fuir. Tant mieux pour toi. Tu n’as même pas menti. Tu es trop déprimée, il ne va probablement pas apprécier votre conversation et toi non plus. Tu reprends une gorgée de ta boisson et t’écroules sur ton dossier, attendant qu’il fasse effet.

« Je te rembourserai le cocktail. Même le tien, si tu veux. Les gens croient que je suis une fêtarde ou quelque chose comme ça parce que je me suis teint les cheveux, mais c’est faux. Désolée de te décevoir. Je suis insupportable. Surtout quand je bois. »

Peut-être que la dernière phrase est de trop, il va vraiment croire que t’es alcoolique. Qu’importe, c’est juste un inconnu à qui tu parleras plus jamais, il peut penser ce qu’il veut de toi. Tu termines ton verre en regardant la cerise seule à l’intérieur. Tu aimes bien les Manhattan, mais n’es en même temps pas très fan de fruits rouges. Tant pis pour elle.  

Wow, tu ne pensais pas que quelqu’un pouvait être aussi à côté de la plaque, et pourtant c’est chose faite. Tu te fiches complètement de sa fête commerciale de merde, c’était juste une comparaison. Tu ne comprends pas pourquoi te teindre les cheveux serait un signe de manque d’attention. Tu n’as jamais crié aucune maladie, tu n’as même pas sous entendu une once de dépression dans tes mots – tu as juste dit que tu étais de mauvaise compagnie. Il rit un peu et te compare à lui-même. Évidemment que non, ce n’est pas un compliment.

Tu es assez lucide et te respectes assez pour ne pas venir essayer de donner la morale à une fille qui voulait très clairement qu’on la laisse seule et qui ne fait que repousser toutes ses avances. Et maintenant quoi ? Il prétend dire que tes cheveux existent juste parce que tu veux attirer la pitié des gens pour les rembarrer juste après. Et puis quoi encore ? Dieu merci tu ne te considères pas comme le centre du monde – il faut avoir un sacré problème pour aller voir quelqu’un seul dans son coin et la diffamer lorsque tu te fais rejeter. Tu m’étonnes que son rendez-vous lui a mis un lapin. Elle a vraiment évité le pire.

Tu tiques instantanément lorsqu’il mentionne la cocaïne – tu as même un peu la boule au ventre, surtout que c’est à cause d’elle si tu retrouves ici. En un sens, oui, ta vie est catastrophique, et c’est justement à cause de la petite poudre dont il est addict. Fort heureusement que tu n’es pas là en prévention, surtout face à un petit con comme lui. Et – encore une fois – tu n’es vraiment, vraiment pas alcoolique, tu en es pratiquement sûre.

« J’espère que tu m’en voudras pas si je me bourre la gueule une soirée pour que mon cerveau arrête de parler parce que c’est soit ça soit je me fous en l’air. »

Tu déblatères sans réfléchir, tu détestes qu’on te hurle dessus ou qu’on te fasse la morale. On ne t’a jamais fait ça dans le passé, parce que d’habitude, les gens qui picolent, on les laisse tranquille, et tes proches ont toujours été compréhensifs – en général, c’est plus efficace que d’agir comme un moralisateur. Malheureusement, tu ne savais pas que tes cheveux bleus étaient apparemment un signal, cela fait une petite année que tu es au Japon désormais et c’est bien la première fois qu’on te sort ça. À Uzume, qui plus est. Daishi a à peu près ton âge, on penserait qu’il en avait fini avec cette mentalité idiote des gens qui sortent ce genre de débilité.

« Mes excuses si mes cheveux t’ont attiré. Je savais pas que faire ce que je voulais avec mes cheveux était interdit par la loi. La prochaine fois ça sera quoi, je l’ai cherché parce que j’ai montré mes jambes ? Pas tout le monde s’habille pour avoir des likes sur Instagram. S’il y a quelqu’un qui cherche de l’attention ici, c’est bien toi. »

Tu ne peux pas t’empêcher de penser à la coke maintenant qu’il l’a mentionnée – alors que c’est exactement pour ça que tu es venue ici. Parce que tu ne voulais pas y penser. Tu sens les battements de ton cœur s’accélérer. Ahh, pourquoi est-ce que ton verre ne fonctionne pas ? D’ordinaire tu arrives à te détendre un peu plus mais tu es juste énervée, tu as presque envie de pleurer de colère mais ton égo (parce que tu en as un) t’empêche de vouloir pleurer parce que tu aurais l’impression de perdre.

« C’est ça, ma vie est une catastrophe. Je suis insupportable quand je suis intoxiquée, et en plus je suis alcoolique, donc je suis tout le temps insupportable. Je suis un horrible personne, non ? Et en plus de ça, tu payes un verre à quelqu’un qui enchaîne les verres depuis une heure. Toi aussi, tu es une horrible personne, ça se voit très bien sur mon visage que je commence à être ivre et tu m’as quand même payé un autre verre. Tu as raison au final, tu es exactement comme moi. Et c’est pas un compliment. »

Lui semblait dire ça d’un ton moqueur avec son petit rire, mais tu réponds sèchement, presque complètement sérieuse. Tu n’as pas envie de te moquer. Peut-être qu’inconsciemment, tu n’as pas envie de te moquer d’une personne qui a une addiction à la cocaïne. Tu n’as pas pitié de lui. Mais tu n’aimes pas qu’il sorte ça avec désinvolture, quand tu te souviens avoir cherché une lame pour mettre fin à tes jours lors de tes premières semaines de sevrage. Peut-être que c’est à toi de lui faire morale – mais tu sais pertinemment que ça ne sert à rien d’agir de cette façon envers des drogués. Ahh, pourquoi est-ce la conversation a fini comme ça... Tu aurais préféré que rien de cela arrive... Peut-être que tu aurais dû avaler une boite entière de médicaments, ça aurait été moins douloureux que de t'énerver.

 

(ptit tw où elle décrit une tentative de suicide si ça trigger sautez le premier paragraphe<3)

Ahh, tu détestes ça. Tu ne pensais pas que ta journée pouvait s’empirer, et pourtant tu as miraculeusement réussi à rendre ce qui devait être un moment de détente par une rencontre désagréable avec un influenceur dont tu te fiches royalement. Si ça ne tenait qu’à toi, tu prendrais ton verre vide, le briserais en milles morceaux pour méticuleusement tailler chacune de tes veines. Tu ne sais pas combien tu en as, mais mille bouts, ça doit suffire. Et si ce n’est pas le cas, tu te fera  une coupure par moment que tu regrettes dans ta vie – et celui là en fait partie. Ta naissance, ton arrivée au collège, ton silence face à ton harcèlement, ton joint pris à cause de la pression sociale, ton rail de cocaïne parce que tu voulais quelque chose de plus extrême, ta tentative de sortir de la supposée addiction qui ruinait ta vie (alors qu’à tes yeux, elle la sauvait) et ton arrivée au Japon. Ça fait huit coupures – sûrement assez pour que tu puisses enfin foutre le camp de cette putain de Terre que tu détestes depuis que tu es née.

Tu te mets à gratter ton poignet sous la table, espérant naïvement que tes ongles perforent une artère.

Il a raison, tu débloques complètement. Tu ne t’énerves jamais, d’habitude, même sous l’emprise d’alcool. Pourquoi est-ce que tu agis comme ça ? Il n’avait probablement aucune mauvaise intention – il voulait juste taper la discute. Tu n’aurais jamais dû mentionner la dépression – il l’a mal interprété, mais c’est de ta faute. Est-ce que ça te fait plaisir d’être insupportable ? Non. Sinon, tu serais tout le temps comme ça. Tu détestes parler autant, surtout pour être méchante. Ahh, tu détestes ça. Toute la tension dans ton corps semble te quitter d’un coup en réalisant ce qui est en train de se passer. Combien de verres est-ce qu’il faut que tu boives pour qu’au lieu de tout laisser exploser, tu étouffes tout ? Peut-être que tu devrais aller te faire vomir. T’excuser, tout vomir et acheter une corde en rentrant. Tu as fait exprès de prendre un appartement au premier étage pour ce genre de moments, et tu regrettes souvent ce choix – sauter par la fenêtre, c’est gratuit.

« Écoute chérie, tes insinuations ne me plaisent pas et pour preuve : je ne suis pas une horrible personne, je n'essaie de t'enivrer plus, il n'y avait pas une goûte d'alcool dans ton verre. »

Pas d’alcool dans ton verre ? C’est pour ça qu’il n’agit pas. Il ne t’avait rien dit de spécialement vexant avant que tu t’emportes non plus… Tu fais n’importe quoi. Tu te grattes le poignet un peu plus fort – tu doutes qu’il le remarque, tu fais exprès de le faire sous la table pour ne pas qu’il se doute de quoi que ce soit. Tu te demandes si tu es censée t’énerver ou pas. Honnêtement, tu as l’impression de t’être plus énervée ce soir que depuis que tu es arrivée à Kobe. À ce niveau, tu as juste envie de pleurer en réalisant à quel point le spectacle que tu as montré ce soir est pathétique – tu réserves d’habitude ce genre de clownerie à ton miroir ou à ton lit. Tu sens les larmes monter – interdiction de fermer les yeux avant qu’elles partent, tu es déjà assez ridicule comme ça.

« Désolée. »

Tu ne sais pas quoi dire de plus. Tu n’es pas spécialement reconnaissante qu’il ne t’ait pas enfoncée dans ta bêtise, tu es juste désolée d’être la mauvaise personne que tu montres. Peut-être qu’au final, c’est ça, la vraie Tamako. Une mauvaise personne qui refuse de prendre responsabilité et qui rejette la faute sur les autres pour pouvoir se prendre en pitié. Tu n’aimes même pas attirer l’attention pour qu’on ait de la peine pour toi – c’est exactement pour ça que tu ne montres jamais rien si ce n’est qu’un faux sourire la plupart du temps. Ahh, tu détestes Tamako.

« Je te paierai vraiment les deux boissons. Tu voulais juste discuter pour passer le temps et j’ai complètement... »

vrillé. C’est le seul mot que tu trouves. Tu pourrais te plaindre encore une heure et lui parler d’ô combien tu es un échec, que c’est comme d’habitude – tu rates tout ce que tu entreprends. Qu’il n’a pas eu de chance de tomber sur toi, qu’il mérite mieux sûrement mieux qu’une fille insupportable. Pas de sûrement – tu es persuadée que même le pire des criminels mérite mieux que Tamako Hywell, prototype raté d’une famille heureuse. Tes parents doivent être si heureux que tu aies enfin arrêté d’être un poids mort pour eux. En plus, tu es carrément de l’autre côté du globe. Quelle chance pour eux.

« Je voulais juste pas que tu passes une mauvaise soirée avec moi. Au final, j’ai empiré les choses. Je suis vraiment pas comme ça normalement… »

Comme d’habitude. Encore une fois. Tu lâches ton poignet et essuies rapidement tes yeux en espérant qu’il ne remarque rien. Tu baisses les yeux pour voir que tu as irrité ta peau, ironiquement. Tu t’occupera de ça quand tu seras chez toi. Qu’importe comment. Tu pousses un très long soupir, comme pour laisser s’échapper le reste d’émotion que tu étais sur le point de faire sortir. De toute façon, ça t’étonnerait qu’il reste. Tu pourras rattraper le verre non alcoolisé qu’il t’a offert en doublant la dose… Il te reste encore quelques boissons que tu n’as pas encore goûté, en plus.  

« Tu es enceinte ?
- Hein ? »

S’il y a bien quelque chose auquel tu ne t’attendais pas, c’est bien ça. Un petit « t’as tes règles ou pas ? » aurait été plus logique que cette phrase. Bien sûr que non, tu n’es pas enceinte – tu es un minimum responsable, tu ne serais pas en train de boire si tu l’étais. Tu n’as pas tes règles non plus – tu as juste un gros problème mental. Pourtant, on t’avait assurée que tu n’avais presque aucune séquelle de ta surconsommation lors de ton adolescence. Tu ne sais pas si tu peux considérer la dépression comme telle, parce que ça fait une grosse dizaine d’années que tu te la trimballes sans y faire quoi que ce soit. Tu aurais préféré qu’il te dise que tu es complètement tarée et qu’il faudrait que tu te fasses soigner, un de ces jours. Mais les psychiatres sont trop chers ici, tu n’es qu’une simple serveuse.

« Non. Je suis juste... »

Tu ne sais pas comment terminer ta phrase. Bizarre. Folle. Ivre à souhait (pas tant que ça, tu reprendrais bien un verre pour te remettre de cette interaction horrible). Détestable. Tu n’as pas envie de préciser que ce n’est pas cette période du mois, c’est une information dont tout le monde se passera avec joie. Tu aimerais bien savoir ce qui l’a mené à cette conclusion, elle est tellement étrange que tu ne peux t’empêcher de retenir un petit rire.

« Ne réfléchis pas à ce que moi je peux ressentir de la soirée. Car ce n'est que moi qui peut le ressentir. J'ai déjà passé des soirées bien pourries en vrai. Tant que tu ne vires pas au coma éthyliques, ce ne sera pas ma pire soirée. »

Le coma éthylique ? Tu n’en as jamais fait, faut croire que ton corps encaisse bien l’alcool. Il arrive souvent que lorsque tu viens seule, un des employés du bar remarque que tu es à ta limite et appelle un Uber – tu n’as jamais vraiment eu la chance d’en faire un, en fait. Pas étonnant, personne ne veut être responsable de la mort d’une gamine de vingt-deux ans ici, les propriétaires seraient bien embêtés. Cette fois-ci, il y aura peut-être Daishi qui t’en empêchera, qui sait. D’ordinaire, tu serais un peu mal à l’aise de boire excessivement avec un homme, mais à ce moment précis, tu te fiches un peu de tout.

« Je peux faire quelque chose pour toi..? »

Il s’inquiète pour toi maintenant ? Peut-être pour te rappeler qu’il n’est pas une mauvaise personne. Tu n’as pas besoin qu’il fasse ça. Dans le pire des cas, il t’a menti, et ta soirée s’empire, et tes amis n’entendent plus jamais parler de toi. De toute façon, si tu continues de boire, tu ne seras même plus capable de réaliser ce qu’il se passe autour de toi, donc ce qui peut t’arriver t’importe peu.

« Me laisser boire de l’alcool. »

Tu réponds sans trop réfléchir – tu n’es pas en colère qu’il t’ait piégée, tu n’es plus en colère tout court, tu as l’impression que tout l’alcool que tu as bu a enfin pénétré ton sang. Inutile de se forcer à vomir, donc, ça n’aura aucun effet. Tu ne sais pas s’il compte rester après que tu aies dit ça. S’il essaie de te raisonner, tu lui diras juste d’aller se faire foutre – après tout, tu lui as déjà dit que tu buvais pour pas te tailler les veines, il pourrait être un minimum compréhensif.

« Je sais que j’ai pris un peu de poids ces derniers mois, mais c’est malpoli de demander à une fille si elle est enceinte. Si je l’étais, je serais évidemment pas ici. »

Tu te lèves un peu difficilement – ah, tu n’es qu’en t-shirt, tu ne peux pas cacher les rougeurs sur ton poignet, qui doivent un peu ressortir vu à quel point ta peau est blanche. Tu les regardes rapidement en espérant que personne n’y fassent attention. De toute façon, ce ne sont pas de vraies coupures, tu n’as qu’à dire ‘ah, j’avais pas remarqué, je sais pas d’où ça sort’.

« Je ne sais pas si tu restes, mais en tout cas c’est moi qui paye. Comme ça je suis sûre qu’on prenne bien ma commande. »

Tu ne sais pas si tu es passive agressive ou si tu prends son piège avec légèreté. Tu n’es spécialement fan de Rhum, mais tu es pratiquement sûre que c’est l’alcool le plus fort qu’ils ont ici, alors autant lui donner une seconde chance.  

Si, c’est malpoli – presque même méchant. Tu as déjà vu des amies pleurer lorsqu’on leur a fait cette remarque. Honnêtement, tu es même un peu vexée, mais c’est un bon moyen de te faire réaliser que tu vas devoir arrêter les Uber Eats un petit moment. Peut-être que tu devrais arrêter l’alcool aussi pour aller avec… Tu sais que tu n’en as pas l’air actuellement parce que tu pues l’ivresse, mais d’ordinaire, tu es quelqu’un de plutôt responsable ! Même avec des idées noires, tu aurais au moins un petit coin de ton cerveau qui t’aurait dit que te saouler alors que tu es enceinte est une très mauvaise idée.

« Alors ajoute moi un rhum arrangé sur "ta" commande princesse. Par contre. Vu ton état, je doute que le barman accepte de te servir aut'chose qu'un soft. »

Non non, tu as totalement encore les idées claires, ce n’est pas un ou deux verres de plus qui vont te faire du mal. Tu as certes mal à la tête et tu sens que ton sens de l’équilibre est déréglé, mais tu es clairement encore en état de boire, promis. Et puis de toute façon ce n’est pas comme si tu conduisais ou que tu habitais super loin – tant pis si tu prends un Uber pour un trajet qui t’aurais pris dix minutes à pied. Ah, avec ça et ce que tu as bu, tu vas devoir serrer la ceinture ce mois-ci… Tant mieux, ça fera moins d’Uber Eats et donc sûrement quelques kilos en moins, au final, tu ne perds rien du tout. À part peut-être la sympathie de ton foie.  

Sûrement parce que tu as laissé un petit pourboire au serveur, il t’a gracieusement laissé commander « ce qu’ils ont de plus fort » - accompagné du rhum arrangé que monsieur a commandé. Promis, ce sera ton dernier – avec lui, en tout cas.

« Tu bosses demain ? »

Tiens, il s’intéresse à toi ? Au final, tu as parlé beaucoup pour en dire si peu sur ta personne. Il ne connaît même pas ton nom. Tu as envie de penser que c’est le contraire et que tu en connais plus sur lui dû à son statut de célébrité, mais à part son nom et le fait qu’il soit influenceur, tu ne sais rien de sa personne. Tu as juste l’avantage de son nom et sa profession (si on peut appeler ça comme ça).

« Nan. Je reprends dans deux jours. Sinon je serais restée chez moi, ça va être dur demain matin. »

Tu préfères préciser que tu travailles quand même pour ne pas qu’il se fasse des idées – tu ne veux pas laisser l’imagination de quelqu’un qui a réussi à croire que tu étais enceinte trop s’emballer. Si tu travaillais demain, qu’est-ce que tu serais en train de faire ? Probablement quelque chose d’encore pire que boire sans modération – tu ne veux même pas imaginer, à vrai dire. Tu regardes ton poignet irrité.

« Je travaille dans un bar à chat – celui pas trop loin d’ici. Tu pourras passer si tu veux. On sert pas d’alcool, et les chats ça fait toujours de bonnes stats sur Internet. Et en plus tu me verras complètement fonctionnelle. »

C’est-à-dire pas en train de passer de deux émotions différentes en moins de trente secondes. Et aussi capable de faire semblant de sourire. Ça te mettrait mal à l’aise de devoir le servir par contre, tu demanderas à un ou une collègue de le faire à ta place… Il n’aura qu’à t’observer de loin, ça te va très bien. Très franchement, tu t’es tellement humiliée devant lui que tu n’as plus envie de le voir du tout. S’il vient et qu’il partage sa venue sur Instagram, ça rapportera des clients, et le patron sera content – et s’il te croit, tu auras peut-être une augmentation, qui sait ?