Quand Shizue parle, Tsuki l'écoute avec la plus grande des attentions. Ces mots lui semblent beaucoup plus adultes que les siens. Est-ce par toutes ces épreuves qu'elle a dû traverser ? On dit que les épreuves font grandir plus vite. Shizue lui donne l'impression d'être une adulte tandis qu'elle a l'impression d'être restée coincée à l'adolescence tout en n'ayant pas vraiment eut d'enfance. Est-ce donc si compliqué de suivre le chemin que la vie prévoit normalement pour la plupart des Hommes ?

Quand son interlocutrice mentionne le fait qu'elle souhaite rencontrer une demoiselle, Tsuki la regarde avec un étonnement qu'elle ne parvient pas à dissimuler. Il y a d'ailleurs un petit silence, comme si elle craignait d'avoir commis une erreur en parlant trop rapidement. Et puis, finalement, elle termine de formuler le fond de sa pensée. Les lèvres de la demoiselle finisse par s'étirer un sourire emplie de tendresse.

- Je te souhaite de trouver cette personne dans ce cas.

Homme ou femme, peu importe. Tant que chacun est heureux. Les mots de son amie la laisse méditative. Il est vrai qu'il est mieux d'être prudent dans toute relation. De ne pas accorder trop facilement sa confiance. Tsuki en a le parfait exemple sous le toit où elle vit tous les jours. Elle peine à imaginer sa mère telle que ses grands parents lui décrivent parfois. Brillante et sérieuse. Douce et gentille. Elle ne parvient à la voir que comme elle est devenue aujourd'hui. Terne, triste, et renfermée. Pourquoi ? Parce qu'une personne mal intentionnée est arrivée dans sa vie et qu'elle en est tombée amoureuse.

- Et si. Je suis certaine que tu as raison. Et peut-être suis-je un peu trop...fleur bleue. Mais j'aimerai rencontrer quelqu'un à qui je puisse faire entièrement confiance et qui aura aussi toute confiance en moi.

Parce qu'elle est certaine que des personnes profondément sincères existent. Personne n'est parfait. Ce n'est pas ce qu'elle demande. Elle est prête à accepter les défauts de la personne qui partagera un jour sa vie, elle l'espère. Elle souhaite simplement que cette personne ne lui dissimule pas sa véritable nature, quelle qu'elle soit. Seiji, son « père », a joué un rôle : celui du prince charmant. Et sa mère a succombé à ces charmes. Alors qu'elle avait tout pour être heureuse. Il a suffit d'un regard, d'un sourire, et le piège s'est refermé sur elle.

- Je ne sais pas si cette personne existe mais...Je l'espère !

Au plus profond de son coeur. Elle n'est réellement impatiente. Elle ne cherche pas non plus. Elle se dit simplement que cela se fera au fil des rencontres et des palpitations de son coeur.

Après avoir but presque les trois quarts de sa limonade elle sort son téléphone pour se mettre sur la page du cinéma qui est à proximité de l'endroit où elles se trouvent.

- Tiens regarde, c'est le programme du cinéma si tu veux qu'on regarde à quelle heure il y a une séance.

Ce serait dommage qu'elles loupent la séance qui pourraient les intéresser. Elle place le téléphone sur la table, entre elles, pour qu'elles puissent toutes les deux voir les titres, affiches et heures de projections.

- J'aime bien les films d'actions ou fantastiques ! Mais je ne dis pas non à une comédie ou un bon policier….En soit on peut voir ce qui te fait plaisir. Sauf un film d'horreur…

Un frisson la traverse presque aux souvenirs du seul du genre qui lui a été donné de voir. C'était il y a quelques mois. Un ami l'avait convaincue avec de plutôt bon arguments il faut dire ! Mais la quasi totalité de la projection avait été une véritable torture. La nuit qui a suivie également.

- A moins que tu veuilles que je m'accroche à ton bras pendant toute la durée de la projection !

La voir recroquevillée sur son siège, les mains en barrière entre son visage et la toile devait cependant être un spectacle assez amusant à voir pour les amateurs du genre. Et quand elle dit « accrochée », Tsuki minimise ses mots.

Shizue semble s'y connaître en films d'horreur. Le genre ne semble pas lui déplaire non plus. Un léger frisson traverse le dos de Tsuki en pensant qu'elle lui a peut être finalement suggéré quelque chose qui lui ferait très envie. Fort heureusement pour elle, son amie propose de choisir un genre qui leur plairait à toutes les deux. Immédiatement, la tension naissantes dans ses épaules s'envole. Ses yeux parcourent rapidement le résumé du film proposé et elles conviennent que ce serait celui-ci. Ne leur restait qu'à terminer leurs boissons avant de se diriger vers le cinéma pour acheter leurs places.

-  Pour les films d'horreur, je ne suis pas certaine d'en avoir jamais vu un bon...Il faudra que tu m'en montres un un jour. Sur un petit écran ce sera peut être un peu moins effrayant !

A demi-mot elle suggère qu'elles pourraient se revoir chez elle à Sanda, ou bien qu'elle pourrait l'inviter. Même si elle se sent toujours un peu mal à l'aise d'être encore chez ses parents quand il s'agit d'inviter des connaissance. Outre le fait de pouvoir être pleinement aux côtés de sa sœur, cela lui permettait aussi de garder un œil sur ses parents. Et surtout sa mère. Et parfois, de s'occuper d'elle, dans ces pires moments.

Une fois la dernier gorgées avalées elles dirigent tranquillement vers le bâtiment qui ne se trouve pas si loin que ça. Elles choisissent leurs places et s'y rendent. Il y a déjà quelques personnes dans la place, d'autres arrivent encore après elles. Ce n'est pas bondé non plus. Quelques minutes après leur arrivée, les lumières baissent en intensité tandis que les publicités commencent. A nouveau Shizue lui mentionne qu'elle est contente de la voir. Tsuki lui sourit et, en fouillant dans son sac sort son téléphone en mettant la luminosité au minimum.

- Moi aussi...Tiens, enregistre ton numéro. Je vais t'envoyer un message pour que tu aies le mien.

Ainsi elles pourraient rester en contact. Ce sera plus simple pour qu'elles puissent se revoir dans d'autres circonstances que celle d'aujourd'hui. Car si elle a accepté cette course pour Seiji, elle compte bien à ce que ça ne se reproduise plus jamais ! Bien que toutes les cartes ne soient pas en sa possession pour éviter un nouveau coup du sort.

- Tu n'auras qu'à me contacter quand tu auras envie, ou besoin, que l'on se voit.

La demoiselle ne lui semble pas très entourées dans cette ville. Ou du moins pas de personnes en qui elle peut avoir confiance et se détendre. Elle se penche un peu plus vers pour continuer la discussion sans se montrer trop indiscrète.

- Je ne connais pas beaucoup Sanda...Tu pourras me montrer des endroits sympas. Je suis sûre qu'il y en a ! Ou alors tu pourras venir à Kobe...On va régulièrement manger ensemble ou boire quelques verres avec quelques amis. Ou on peut se voir simplement toutes les deux, ça me va très bien aussi !

Elle réprime un petit rire face à ses propres mots qui semblent jaillit de sa bouche à mesure que ses pensées forment des idées. Un homme quelques rangs devant elles se retournent et leur lance un bref regard désapprobateur qui n'échappent pas à la demoiselle. Cependant, cela la fait sourire d'avantage bien qu'elle ai certainement le visage écarlate. Elle s'enfonce d'avantage dans son siège.

- Et je parle beaucoup trop.

Son enthousiasme est palpable et n'a pas dû échapper à sa voisine.

- Je m'attendais à passer une des pires journées de ma vie...Finalement ce n'est pas du tout le cas.

Très loin de là. Même si le bref échange avec le père de son amie et cette attente dans le couloir qui l'a précédé auront suffit à alimenter sa terreur de ce monde obscur de trafique. Devant elles, les pubs touchent à leur fin.

Finalement Shizue lui indique que la plupart de ses sorties se font tout de même sur Kobe. Surement car elle y connaît plus de monde. Aussi parce que les rues sont plus sûres le soir ? Tsuki n'ose le lui demander. Ne voulant pas gâcher ce petit instant de gaité. Ça lui fait plaisir qu'elle accepte le fait de se revoir, dans d'autres conditions que celles-ci.

Leur discussion s'achève quand le film commence. Pour suivre un minimum l'histoire, et ne pas déranger les autres spectateurs. Cela ne les empêche pas de faire quelques commentaires à voix basse, sur les scènes ou les jeux d'acteur. Quoi qu'elle pourrait en dire, Tsuki passe un bon moment. Grâce au film, certes, mais surtout grâce à la charmante compagnie à ses côtés. Elle a le sourire aux lèvres quand elles quittent la salle noire.

- Il n'était pas si mal ce film finalement !!

Elle ne se fit pas souvent aux critiques de toute manière. Il est toujours mieux de se faire sa propre opinion sur toute chose ! Tandis qu'elle consulte son téléphone, Shizue lui annonce qu'elle compte la raccompagner. Pour qu'elle ne soit pas seule ? Et qui sera là pour la raccompagner elle ensuite dans ce cas ? De toutes les façons, la demoiselle n'avait pas imaginer que son amie se donnerait cette peine.

- Oh non ne t'en fais pas...J'ai un bus dans assez peu de temps à priori. Mais on peut l'attendre ensemble si tu veux.

Pour preuve elle lui tend son téléphone avec les horaires des bus, histoire qu'elle ne croit pas à un prétexte. En vérité, faire ce bout de chemin en sa compagnie aurait été très plaisant. Mais il est déjà tard et l'idée de la savoir seule pour rentrer ne lui plaisait pas spécialement non plus.  

- Comme ça tu n'auras pas tout le chemin retour à faire toute seule.

Chacune se soucie de l'autre.

Elles rejoignent l'arrêt de bus situé à proximité du cinema. Un lieu de passage assurément. C'est seulement en arrivant là que Tsuki prend conscience que ce petit moment inattendu va prendre fin, très rapidement. Elle qui, d'ordinaire aime la sécurité des choses prévisible, se sent désarmée face à ce petit moment de bonheur non préparé.

Quand elle voit le bus arriver au loin, Tsuki est soudain prise d'une vive émotion. Ne sachant trop comment remercier son amie et lui faire part de sa bienveillance à son égard. Alors, à l'abri des regards du véhicule et des passagers indiscrets qui arrivent, elle se rapproche de la brune et passe ses bras autour d'elle. L'étreinte n'est ni brève ni attardée. Elle lui laisse juste le temps de murmurer quelques mots.

- J'ai été vraiment très heureuse de te revoir Shizue….Ecris-moi quand tu veux.

Pour sortir. Pour qu'elles s'appellent. Ou simplement pour échanger quelques mots. Elle voulait bien lui servir d'excuse pour échapper à cet endroit qui ne la rend pas heureuse. Et ce, autant de fois qu'il le faudrait.

Ses yeux se portent à plusieurs reprises sur la demoiselle tandis qu'elle monte dans le bus et règle son voyage. Une fois assise, elle lui adresse un dernier signe de la main avant que le véhicule ne s'éloigne. Presque immédiatement elle sort son téléphone de son sac pour prévenir sa sœur qu'elle est sur le chemin du retour. Si cette dernière lui répond quasi immédiatement, elle constate que son père, lui, n'a plus rien écrit depuis qu'elle lui a indiqué avoir remis l'enveloppe. Il ne s'est visiblement pas inquiété de ne pas la voir rentrer immédiatement. A ce stade, elle ne se sent même plus déçue. Car, en soit, ça n'est pas réellement une surprise.

Mais finalement, cette escapade lui aura permis de retrouver Shizue. Sanda possède des gens de grande valeur dans sa ville, elle espère que cela servira à son amie. Parce qu'elle mérite mieux que la vie qu'elle mène actuellement.