la bonne clope

Le couloir disperse le son de sa démarche, en chaussettes-claquettes, à bout de bras un sachet en plastique contenant six cannettes de asahi fraîches, Téva annonce déjà la teneur de sa soirée. Elle vérifie une dernière fois l’heure, pas trop en retard ni trop en avance. Le paquet de nouilles chinoises mangées cru manque de se disperser dans l’ascenseur, elle retient une injure. Si le concierge la voit se trimballer comme si Koyane était un camping low-coast, elle sera fichée. Du coude elle commande le rez-de-chaussée, un message vocal envoyé à Logan pour dire qu’elle est vraiment en chemin, son dernier assurant le même mensonge date d’il y a un quart d’heure. Il va rien lui dire c’est un bon gars, puis la première bière sera pour lui.

Elle sifflote et ses airpods diffusent le dernier album de Royal Blood à défaut d’espérer chopper un billet pour assister à un de leurs concerts. C’est devenu une drôle d’habitude d’écouter de la musique même pour un si court trajet, elle a tenté de se pencher sur la question et n’a pas trop aimé les conclusions possibles à ce problème. Certains parlent de stress et d'inquiétude, un échappatoire à la vie quand rien ne va plus très bien. Ca l’agace de faire face à ses sensibilités alors le son est augmenté.

Quand Triggers se termine, Tev se trouve à l’entrée du parc. Il est beau et éclairé dès le couché du soleil et en voyant ça elle se dit que son existence, aussi instable soit-elle, est pas mal dans son genre.
Il se repère vite Logan, un grand brun bon à jouer dans des séries devant lesquelles madame Ito bave le week-end aprem. Sauf qu’elle l’aime pas, le Logan. Elle dit qu’il a une attitude inadéquate pour le voisinage et ça la tue qu’il se pavane avec autant d’aisance, détériorant l’harmonie familiale de leur résidence, rien que ça !
La blonde ne lui a jamais rétorqué quoi que ce soit parce qu’elle se doit de garder sa langue dans sa poche et parce qu’il est hilarant de garder le secret sur leur amitié. Ito frôlerait l’infarctus si elle savait. Et avant qu’un riche ne passe l’arme à gauche, il faut s’assurer d’être sur son héritage.

Les écouteurs sont rangés en douceur, il faut soigner ses apparitions et sur l’étendu d’herbe impeccablement tondue, sort du lot le mal-aimé du quartier - mais tu vaux mieux que tous ces hypocrites, Logan.

Rothschiii! Un léger appuie de la semelle sur une omoplate pour signaler sa présence. Hey hey! Et le sac est levé au niveau du visage, le sourire flamboyant qu’on réserve à ces rencontres hebdomadaires qu’on chérit tant. Quoi de neuf ?
La main fouille dedans, fait du bruit inutilement parce qu’elle n’a pas réellement de difficulté pour en chopper une. La bière est tendue, la trace sur son vêtement essuyée et son fessier se pose à ses côtés dans un bruyant soupir.
Elle relève la manche de son gilet à l’aide de ses dents et tire sur la languette de sa cannette pour s’abreuver. On est bien là, pourvu que ça dure.

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Elle affiche ses ongles abîmés par l’eau et le savon du dernier bain donné aux mômes et les bentos préparés avec amour pour leur sortie scolaire. Les doigts s’agitent dans les airs aux manières de la reine du lycée qu’elle n’a jamais été à la vue de ce Logan qui est l’une des seules constantes tranquilles dans sa vie japonaise. Le doigt d’honneur est retenu, ce sera pour la possible prochaine pique qu’il lui enverra.

J’attends que ça, je suis même très triste que ce jour ne soit pas encore arrivé.
Avec lui elle retrouve sa langue maternelle, la mélange avec celle apprise sur le tas et par expérience. Son cerveau ne sait plus sur quelle sonorité s’appuyer et il pioche des deux côtés pour recouvrir tout le vocabulaire sans qu’elle se mette à bégayer.

Un kanpai discret pour cette bière bon marché, contrairement au bruit de bouche qui démange tous ses sens. Ca la titille, il n’y a eu que les murmures qui la dérangeaient au début, maintenant elle sent que le son de quelqu’un qui mange ou boit trop bruyamment réveille en elle l’envie de s’arracher les oreilles. Se faisant violence, Téva s’étouffe sur sa bière à sa remarque.
Il est là, le fameux majeur levé.

La feeerme, mais sans agressivité, ce n’est qu’un net constat que, oui, elle nage toujours en pleine dèche et son avenir ne brille pas autant et aussi vite que prévu. Ça l'agace, la ronge de l’intérieur et lui arracherait bien un cri venu du coeur.

Ton bar est nul, vraiment tu devrais trouver autre chose avant qu’il fasse faillite et que tu finisses au chômage. En plus ils vendent des Asahi là-bas aussi, enfin Tev ne sait pas si c’est une magouille d’un des barmen qui veut économiser la vraie bière, mais elle en a vu un un jour en verser une et la taxer plus chère. Bref, une anecdote qu’elle ne reportera pas car à y regarder de plus près, c’est un move ingénieux.

Enfin, au chômage..., elle rit dans sa répétition. Logan n’est pas le plus mal placé entre eux deux. Il sera rebondir et continuera certainement à aligner les zéros sur un compte dont elle est bien curieuse du montant total.

T’as pas une piste pour un métier qui paye bien, dis ? J’sais pas, je suis pas moche et je sais me défendre s’il le faut, c’est de bons critères tu trouves pas ? Le sourire assuré tente de lui redonner de l’aplomb.

A défaut d’avoir un diplôme académique d’une prestigieuse université et des bonnes manières la menant tout droit à un mariage prolifique. Cette option reste d’actualité, néanmoins on ne réussit pas en se contentant d’un seul plan.

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Le regard au coin qu’elle lui renvoie n’a pas besoin d’ample interprétation. Elle agite la canette, s’étonne de ce qu’il lui reste ; sa fatigue accentue sa descente. Téva comprend que cette parenthèse dans son quotidien était une nécessité.
Peut-être que si Logan lui faisait un rabais sur une tournée de shots purs elle accepterait de lui faire un compliment sincère sur son taudis qui lui sert de taverne. Il y a de jolies têtes qui passent l’encadrure de la porte, elles suffiraient à la motiver à revenir y faire un tour.

Plutôt que de lui avancer cette option, Tev se dit que ce serait plus marrant de débarquer à l’improviste et de quémander d’un de ses sourires flamboyants une ristourne sur le bon compte de leur amitié. Un de ces soirs les étoiles s’aligneraient assez pour qu’elle sorte de sa tour argentée et beaucoup trop lumineuse. Un de ces soirs son moral remonterait en flèche - sûrement entrainé par ce foutu salaire enfin versé.
A l’écoute de l’éloge sur sa beauté, une main se glisse dans sa poche et elle en sort son paquet, le briquet tarde à se faire sentir sous les griffes manucurées. Un battement absent, la poitrine se relâche : le voilà.

Elle sait plus s’il fume le Logan, un barman ça fume non ? Ça doit, pour supporter les clients, pour se la jouer cool, pour entretenir son image léchée de beau gosse.

Un boulot normal ? Elle aurait mieux dû naître riche.
J’sais pas, j’ai pas une tête à servir les gen- elle se coupe pour pouffer de rire, son métier consiste à servir les gens en fait. La flamme éclaire sa vision ambrée, la fumée s’échappe de sa bouche - à peine inhalée déjà expirée. Je suis pas douée pour les cocktails et les discussions merdiques pour faire genre je suis intéressée par ce qu'on me raconte.

Logan remet en doute ses compétences physiques.
Il sait pas qu’elle frappe des fois plus vite qu’elle réfléchit. Angela en a eu marre de voir sa progéniture se mettre dans le pétrin à un si bas âge. Si l’excuse de sa jeunesse fonctionnait, en prenant des années Téva n’avait aucune raison de continuer à répondre par la violence plus que par l’intelligence.

Attends watch and learn, dit-elle en entendant son dos craquer par l’effort surhumaine de sortir de cette zone de confort, la bière tenue du bout des doigts et le filtre écrasé entre les dents.

Tu veux quoi en premier ? Mon coup de pied ?- et elle recule d’un pas, se cambre en arrière et vise l’air - hm si le visage d’un ex pouvait lui servir de cible. Elle sent rapidement son équilibre tanguer, alors son rattrapage se fait à la toute dernière minute. Le bras s’appuie sur du vide pour la maintenir debout. Dans ses côtes raisonnent ses battements cardiaques tandis que la blonde lâche un cri biscornu. Je préfère utiliser mes poings en vrai, et sa bouche pour cracher, mais ça Logan n’a pas à le savoir. Faut pas juger mon niveau, je suis pas dans un bon jour, en théorie.

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Téva ne s’est jamais couverte d’éloges lorsqu’il est question de ses qualités de bagarreuse. C’est bien à cause de son manque souvent cruel de stratagème qu’elle a fini plus d’une fois en journée de travaux généraux. Quand elle se ramène pour se battre, ce n’est pas pour élaborer un plan concret de A à Z, mais plus taper dans le tas et maximiser les dégâts en redoublant les coups sans s’interrompre. Angela l’appelait la furie, souhaite encore à ce jour que sa fille se calme et se serve de son énergie pour faire des choses plus intellectuelles plutôt que manuelles. Logan a raison de se moquer de sa position et de ses choix d’action, il a devant lui une gamine qui n’a pas froid aux yeux alors qu’elle devrait gagner en lucidité.

Cela se voit qu’il a de l’expérience et une maturité dans la lecture d’une situation que Tev ne possède pas ou du moins pas encore.
Il n’attend pas, lui donne très vite des premiers conseils primordiaux. La blonde s’arrête, l’écoute d’une oreille avant de s’avouer qu’il a bien raison; ce n’est pas comme si on ne lui avait pas déjà joué ce sale tour que de lui attraper le pied pour la faire tomber. Ses coudes et ses omoplates s’en souviennent toujours.
Se les frottant par réflexe en souvenir des luttes qui l’ont plus desservies qu’autre chose, elle rigole et prend note. Son visage ne paraît pas autant concentré, à l’instar de son esprit qui s’échauffe et revoit ses victoires passées sous son nez. Ça commence à cogiter tout là-haut. Peut-être qu’elle aurait pas gâché ses aprems à ramasser les déchets dans la forêt si elle avait tenté d’atteindre les yeux plutôt que les jambes.

Elle suit dans le noir ce geste pointant la fameuse partie qui lui ferait gagner ses futurs prises de tête dans les rues du Japon - il faudrait pas lui offrir tous ces tips Logan, ce serait lui filer de très mauvaises intentions. Ah ouais carrément.

La seconde d’après, la force de Logan se fait sentir contre sa trachée. Rien que par cette mise en place, il est facile de conclure qu’il n’est pas du genre à perdre s’il décide de se lancer. D’un coup, Téva se sent bête et sa fougue naturelle voudrait se faire la malle et la planter. C’est pas le moment, elle panique un peu.
Attends, comment j’suis censée - elle déglutit, réfléchit avec ses trois neurones qui se battent en duel. On s’en fiche de la taille alors, même si tu fais deux mètres et pas moi ? Parce qu’il en impose, à côté la blonde n’est qu’une brindille et les gens trouveraient à en rire de cette situation - ou ils appelleraient les flics.

Ok. Depuis quand on se défile Tev, c’est pas du style de la maison et il sait pas mais elle en a pris dans le visage sans que ça freine son instinct de (self) destruction.

Les pieds à terre, le message est reçu, ils s’y enfoncent, ne bronchent pas d’un centimètre. Pas le coude, il a dit les poings. Le pouce rentré dans la paume, son ami peut être fier, il n’a pas besoin de lui apprendre ça. Elle se retourne vite, l’hésitation ébranle sa conviction, d’habitude on tape quand on est énervé donc s’entraîner n’est pas un exercice facile. Téva vise sous le sternum.

C’est pas lui qui criera le premier, mais elle.
AAAÏE ! Ses phalanges ont morflé, ses os tremblent sous sa peau rougie de l’effort. Meeec, se tenant le poing gauche, le coin des yeux humides. Sa jambe la démange et dans l’action partirait presque pour lui filer un coup, la douleur l’a mise en colère. T’as pas un torse, c’est de la glace punaise.

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Les os de la main méchamment amochés, Logan n’en manque pas une pour remettre un peu d’ordre dans son chaos. Elle sait bien qu’elle n’aurait pas pu s’y prendre plus mal, mais foncer tête baissée c’est la seule chose qu’elle connaît et pensait maîtriser. Comme souvent, elle se sent tout con et se mure dans un silence bouillant d’envie de remettre le couvert. Tout est bon pour le contredire, lui montrer qu’elle a pas si tort d’agir par instinct avant de freiner brutalement ses éclats trop scintillants.

Évidemment qu’il a raison, il y a plus de chances qu’elle finisse à l’hosto avec sa façon de procéder plutôt que d’y envoyer quelqu’un. Il ne le sait pas forcément, mais elle en a connu des sessions aux urgences, lèvres ouvertes, dents intactes par pur miracle et la mâchoire en souffrance quand ce n’est pas des bleus partout sur le corps prouvant une défaite pitoyable contre meilleur que soi. Il suffit d’un rien pour lui filer le démon, alors soit elle perfectionne ses techniques, soit elle calme le volcan qui n’attend que d’exploser à chaque interaction qui sonne mal à ses oreilles. Et disons que Tev en a rien à faire de changer de comportement, ça n’arrivera jamais, alors la réponse est évidente.

La tête est secouée par le geste fraternel, elle n’émet aucune résistance et exagère même son mécontentement. Une enfant à qui on refuse un bonbon parce que l’heure du goûter est passé, mais promis demain t’en auras deux au lieu d’un. La gamine avide qu’elle est veut bien le croire. Il s’en va boire sa bière, elle récupère la sienne et boit une gorgée non sans secouer une dernière fois son poing. Fait chier.

Je sais. L’avouer c’est semblable à se mordre violemment la langue, zéro effluve de sang pour témoigner, la douleur reste toutefois identique. Son pied heurte l’herbe fraîchement tondue - les riches exigent une pelouse impeccable même quand ils dorment, quel merdier -, enfin elle se recoiffe après s’être pris une mèche dans les yeux. L’oeil déjà humide finit de lâcher une larme effacée du dos de la manche.

Son souffle normal reprend seulement maintenant. Ses poumons crient pour plus d’oxygène, le canal rompu par la rage de ce fail laisse enfin l’air approvisionner son système.

Mh ? Le copie-t-elle. Un rire soufflé du nez suivi d'un giga sourire, J’crois pas que tu sois si innocent que ça non plus. Depuis quand un simple barman en sait autant sur la baston, vraiment posons nous deux secondes. Tev ne cherche pas à creuser parce que si Logan ne dit rien c’est que ce n’est pas le moment, elle a rapidement compris quoi attendre de sa part et quand.

Alors figures-toi qu’au Canada on a été très gentils avec moi, je me suis juste tapé des tas d’heures de travaux d’intérêt là, je connais pas la couleur des murs d’une quelconque prison.
..Et toi alors ? L'expression curieuse cachée derrière la canette.

Bon timing ou pas.

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Le club med t’as vu. Sauf qu’au lieu de côtoyer les mémés avec des problèmes de jambes lourdes et de rétention d’eau, on se coltine les adolescents trop imbus de leur personne pour reconnaître leurs torts et ils enchainent les insultes, les comportements qui étirent la journée et agacent les agents qui les supervisent. Bon, Téva n’est pas non plus toute blanche dans l’histoire et elle avouerait à demi-mots avoir elle-aussi lâché ici et là quelques remarques fleuries. Mais au bout de la seconde fois déjà, elle avait compris que ce n’était pas ce qui allait faire briller son avenir. Les entreprises regardant de très près le casier judiciaire pour payer le minimum ne veulent pas recruter des gens à problèmes. A raison.

Ouais et une literie digne d’un Hilton, ça me manquerait presque, Koyane est trop propre et trop chic. L’ironie lui grille la gorge ou est-ce la cigarette qu’elle s’allume. La bière est terminée dans la foulée, le mélange fait vraiment after party sauf que la fête c’était sa main broyée par ses foutus abdos. Broyée pour le ressenti, en vérité elle peut de nouveau la bouger et a retrouvé de sa fougue.

Ouvrant et fermant le poing, le récit de Logan en dit long sur son vécu et peut-être que Téva n’a pas assez fouillé dans l’historique de son ami parce qu’elle est surprise de l’étendue de ses connaissances sur le sujet. Quand il parle de ses cicatrices, évidemment que son regard les examine dans la lumière artificielle des lampadaires. C’est l’une des premières choses qui l’a interpelée quand ils ont commencé à passer du temps ensemble, sauf qu’on demande pas comme ça “Et tes cicatrices c’est du à quoi ?”. C’est bien que ça vient de lui, il a dû prendre cher et en même temps rendre les coups avec un degré de puissance qu’elle ne connaît pas forcément encore.

Chaud, désolée je peux pas te donner d’aussi bons conseils que toi, t’es meilleur que moi pour ça. Un brin désolée de servir à rien là maintenant, à part être une élève de baston casse-pied. Par contre quand je suis giga énervée, j’me roule un joint, si jamais ça peut t’aider dans le futur. Elle lui filera les infos de son dealer préféré !

La canette balancée dans la poubelle la plus proche, sa paume tapote contre son diagramme, les dernières gouttes ont un peu de mal à descendre et le tabac n’aide pas à correctement avaler. Le filtre est vite écrasé, elle l’a très bien entendu. Le sourire remplace la grimace, On en fait pas deux des potes comme lui, on en fait non plus pas deux des mecs qui servent de punching ball en guise d’exercice.

Le bout de cigarette est lâché, échoue par terre après avoir ricoché sur le genou de Téva, sans dire un mot - elle essaye de travailler son effet de surprise voyez-vous ! -, elle vient frapper exactement là où cela a raté avant. Son corps doit en avoir marre de la voir si bornée et foncer tête baissée.
Dans l’action, sa jambe droite se lève, le genou a récolté quelques restes de cendre et il se dirige entre les jambes du Rotschi. C’était plus fort qu’elle, dans l’euphorie de vouloir prouver, elle s’est un chouïa emportée. Oh mer- une main plaquée contre sa bouche.

Se sentant mi-coupable, mis épatée d’avoir visé juste, il y a blanc et elle qui manque de glisser et de se casser la figure sur l’herbe.
Sa jambe met du temps avant de se détendre, la voix étouffée sous ses doigts Cavaouçavapas ?

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Non ça va pas, bien sûr ! Téva creuse ses joues de ses ongles, une trainée de marques rouges éphémères témoigne de son choc. Les griffures restent subtiles, pas la douleur de son pote.
Elle cherche des justifications à n’en plus savoir les formuler dans aucune des langues maîtrisées, des mensonges brodés et le corps raidit devant le spectacle de l'effondrement de Logan. Les dents grincent devant la douleur, elle n’a pas subi le coup, mais elle peut deviner l’intensité de la douleur.

Le karma aurait dû la frapper et la faire tomber, peut-être qu’il aurait eu sa vengeance avant même d’y avoir pensé.
Lorsqu’il parle enfin, c’est un véritable soulagement et son humour toujours intacte finit par la rassurer totalement.

Genre ton chat pourrait te l’apporter cette bière, hein. Même coupable, prise la main dans le sac, ramenée devant le tribunal des bannis, Téva continue d’ouvrir grand la bouche pour dire une nouvelle bêtise. On refait pas le monde comme on la referait jamais elle.

Elle s’en va récupérer le médicament, un anesthésiant très puissant contenu dans une forte dose d’alcool. Enfin, l’idéal serait de finir si bourré qu’on ne sentirait plus rien, mais les bières made in seven eleven n’offrent qu’une simple vision de la porte de ce genre de paradis. Pas l’accès.

Regarde, j’te l’ouvre même, tout est pardonné maintenant, le décide-t-elle. C’est pour éviter à Logan de se fatiguer davantage en parlant. Ils sont sur la même longueur de violence, pas besoin de trop communiquer - si ?
Elle le rejoint au sol, la fraîcheur de l’herbe est désagréable et en remuant un peu sur place, le chaud semble se créer.
Le silence la laisse dans la réflexion, well c’est pas faute d’avoir essayé de se retenir jusqu’à la fin. Un dérapage est si vite arrivé entre deux têtes brûlées en liberté.

Avoues que, elle pose sa bière à côté même de son visage, j’ai géré l’attaque. La fierté s’entend dans sa voix, le rire chatouille sa gorge, fait presque chanter les sonorités dans ses syllabes. C’est pas bon d’en rigoler, c’est pas bon de se moquer ainsi de son ami. Mais si on peut même pas se marrer du malheur malvenu entre copains, avec qui on peut se décharger avant de devenir complètement zinzin ?
J’ai travaillé l’effet de surprise t’as vu, franchement je me donne presque 90. Et ça y est, enchaînant pirouettes et roues sur sa lancée. Téva frotte du dos de la main sa joue, les moustiques de la ville n’épargnent pas les quartiers riches et ces sales bestioles écourtent souvent les soirées à la belle étoile.

La tête haute vers le ciel lumineux, on croit voir passer une étoile filante, mais depuis qu’on lui a dit que c’était une comète qui pénétrait dans l’atmosphère, Téva se demande constamment où elle a fini par s’écraser. Pas ici en tout cas, pas pour cette fois. Alors, elle ferme les yeux et fait le vœu d’être au moins à égalité parmi les héritiers de Logan. Rien que ça.

Quand j’veux tout quitter, je pense au fait que si je pars je te verrai plus aussi souvent, enfin on se referait plus aussi spontanément quoi. C’est nul. Pourquoi les gens ne peuvent pas bouger avec nous ? La vie craint et qu’on vienne pas lui dire qu’on a tous de quoi vivre heureux, elle a une bonne liste de contre-arguments.